Des Choses à lire
Visiteur occasionnel, épisodique ou régulier pourquoi ne pas pousser la porte et nous rejoindre ou seulement nous laisser un mot ?

Après tout une communauté en ligne est faite de vraies personnes, avec peut-être un peu plus de liberté dans les manières. Et plus on est de fous...


Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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Georges Brassens, Lettre à Toussenot

La date/heure actuelle est Ven 26 Avr - 18:50

329 résultats trouvés pour nouvelle

Francisco Coloane

Cap Horn

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Cap_ho10

Quatorze nouvelles sur la brutalité de l’existence pour les animaux (y compris l’homme) en Patagonie, que ce soit dans les estancias magellanes, dans la pampa ou en mer. Ou plutôt de brefs récits, rapportés par un narrateur comme autant de témoignages, ce qu’ils sont au moins en partie.
Le dernier texte, qui donne son nom au recueil, résume bien l’ensemble : des hommes tuent les bébés phoques où ils sont mis au monde, puis s’entretuent.

« Le couteau était pour Denis comme une prolongation de lui-même, un sens supplémentaire grâce auquel il recevait de secrètes et agréables vibrations. Il l’avait toujours en main, coupant des longes de cuir, amincissant des lanières, effilant les fines veines de guanaco qui servent de fil à coudre. » (La voix du vent)

« Denis était-il un criminel-né ? Ou bien ses vingt années de dépeçage avaient-elles fait de lui un homme accoutumé à son lot quotidien de victimes ? » (La voix du vent)

« Nous étions à la mi-décembre et la nuit, sous ces latitudes, est presque inexistante ; les jours se mordent la queue, car à peine le crépuscule commence-t-il à étendre ses ombres que la clarté laiteuse de l’aurore les efface. » (L’iceberg de Kanasaka)

« Puis nous donnâmes à manger aux chiens et nous nous assîmes autour du feu pour boire le maté et goûter ce calme indicible, mélancolique et parfois angoissant qui s’installe la nuit dans les déserts et les pampas fuégiennes, où nul oiseau ni insecte ne viennent troubler la solitude et le silence. » (Une nuit dans le Páramo, III)

« C’est la vie, compagnons ! Nous finirons tous de la même manière, comme les moutons que nous conduisons de l’estancia à la chambre froide ; à la différence près que les capones [moutons châtrés], on les engraisse et que la viande part en Europe dans des boîtes de conserve de toutes les couleurs, tandis que nous, on se serre la ceinture, on nous roule dans la farine et on nous marche sur les pieds ! Et au bout du compte nos pauvres carcasses s’en vont pourrir dans la boue, ou parfois, histoire de changer, on nous envoie, sans prendre la peine de nous engraisser, dans ces charniers humains que les riches creusent entre les frontières ! D’ailleurs, il n’est pas impossible qu’on finisse bientôt là-bas ! J’ai entendu dire que toutes ces bêtes étaient prévues pour une guerre prochaine. » (Chiens, chevaux, hommes)


Mots-clés : #aventure #nature #nouvelle #solitude
par Tristram
le Ven 27 Déc - 23:03
 
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Sujet: Francisco Coloane
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Samuel Beckett

Premier amour

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Premie10

Un certain cynisme, un côté abject sourdent de cette brève œuvre des débuts, qui donne une approche plus aisée du personnage, toujours un peu le même au cours de cette descente dans l’être que retrace la trilogie Molloy/ Malone/ l’Innommable et toute l’œuvre qui suivra. Ici, c’est surtout l’absence de communication véritable avec autrui et de possible empathie du narrateur qui sont mises en scène. Une impression de malveillance cache la sensibilité pessimiste à la misère humaine.
« La chose qui m’intéressait moi, roi sans sujets, celle dont la disposition de ma carcasse n’était que le plus lointain et futile des reflets, c’était la supination cérébrale, l’assoupissement de l’idée de moi et de l’idée de ce petit résidu de vétilles empoisonnantes qu’on appelle le non-moi, et même le monde, par paresse. »

« J’ai beaucoup aimé, enfin assez aimé, pendant assez longtemps, les mots vase de nuit, ils me faisaient penser à Racine, ou à Baudelaire, je ne sais plus lequel, aux deux peut-être, oui, je regrette, j’avais de la lecture, et par eux j’arrivais là où le verbe s’arrête, on dirait du Dante. »

« Cela me faisait mal au cœur, de quitter une maison sans qu’on me mît dehors. »


Mots-clés : #nouvelle
par Tristram
le Mer 25 Déc - 12:30
 
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Sujet: Samuel Beckett
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Antonio Tabucchi

Le jeu de l’envers

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Le_jeu10

Plusieurs textes, plusieurs registres (d’ailleurs assez éclectiques), de la saudade portugaise à l’influence de Fitzgerald (et Woolf ‒ et de nombreux autres auteurs) en passant par l'enfance, avec une poésie entre amertume et mélancolie.
J’ai inévitablement été charmé par un petit texte, Théâtre : 1934, un jeune Portugais dans la brousse du Mozambique, sous les auspices de Conrad ; il y est convié par un gentleman anglais à des séances de Shakespeare qu’il interprète seul.
« L’Afrique, avec son immanence et sa lassitude, augmentait les distances et amortissait les souvenirs. »

« L’Afrique était un territoire de l’esprit, une non-prévisibilité, un hasard. En Afrique tout le monde avait l’impression d’être loin, y compris de soi-même. »

« Le soir qui tombait s’emplissait des bruits intranquilles de la forêt, les moustiques commençaient à être redoutables, une brise très légère nous apportait l’odeur âcre du sous-bois. »

Le chat du Cheshire (celui d’Alice)
« Mais au fait, est-ce que les choses ont un sens ? Peut-être que oui, mais c’est un sens caché, on le comprend après, beaucoup plus tard, ou alors on ne le comprend pas, mais elles ont quand même un sens : un sens qui leur appartient, bien sûr, qui parfois ne nous concerne pas, même si nous croyons le contraire. »

Vagabondage (en hommage au poète errant Dino Campana)
« Et c’était cela, l’étrange fonction de l’art : arriver par hasard à des personnes prises au hasard, parce que tout est hasard dans le monde, et que l’art nous le rappelle : et c’est pourquoi il nous rend mélancoliques et nous réconforte. Il n’explique rien, comme le vent n’explique rien : il arrive, il agite les feuilles, et les arbres restent traversés par le vent, et le vent s’envole. »

« La route, et sa voix de sirène. »

Une journée à Olympie (qui redonne la parole à Pindare)
« Le Vainqueur se souvenait de ces atmosphères fraîches et ombragées : il se souvint de ses jeux d’enfant avec Égine, de leurs courses entre les colonnes et des rires innocents de l’enfance, en un temps qui était passé depuis peu et qui déjà ne lui appartenait plus, et il pensa au temps. Les pieds rapides du Temps, qui laissent des traces des choses dans la mémoire quand ces choses elles-mêmes n’existent plus. Et ainsi, lorsqu’ils arrivèrent dans la salle centrale et qu’Égine le fit s’étendre à son aise sur les coussins dans la position la plus commode pour qu’il lui raconte sa journée victorieuse, il commença à lui parler du Temps tel qu’il l’avait ressenti à Olympie.
‒ Le témoin unique de toute vérité exacte, le Temps, règne. Son empire ne concerne pas seulement la clepsydre, mais commande à toute chose, parce qu’il est l’harmonie et le mouvement, la mesure et le rythme, la scansion, la pause, le silence. […]
Voilà, et ainsi tu arrives et sens sa présence : la respiration du Temps. Il arrive avec la brise du soir, comme un souffle : et cela, c’est le Temps. Il respire dans la moindre feuille des saules touffus qui se balancent, chacun à son propre rythme : et cela, c’est le Temps. Il brille avec le ciel que Vesper embrase : et toute lumière qui scintille est Temps. Il respire dans le corps des hommes, qui par leur respiration sont Temps vêtu de chair. Et toi, dans cet endroit-là, tu comprends que la compétition est comme la musique, la danse et la poésie ; et que le Temps gouverne le cosmos. »


Mots-clés : #nouvelle
par Tristram
le Mer 18 Déc - 0:22
 
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Sujet: Antonio Tabucchi
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Marguerite Yourcenar

Comme l'eau qui coule

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Comme_10


Trois nouvelles ; Anna, soror…, Un homme obscur et Une belle matinée.

Anna, soror…
C’est une relecture pour ce premier texte, superbe, et je suis de nouveau ébloui par le style, les jeux d’allitérations et scansions ponctuées de Marguerite Yourcenar, pourtant toujours juste. Est retracé le tragique inceste entre un frère et une sœur de la noblesse espagnole occupant Naples au XVIe siècle.
« Les constructions inachevées, dont l'aspect, comme pour décourager le maître d'œuvre, imite par avance la ruine qu'elles seront un jour, lui rappelaient que tout bâtisseur, à la longue, n'édifie qu'un effondrement. »

Un homme obscur, c’est Nathanaël, un humble Hollandais au XVIIe siècle, doué pour le latin, marin aux Amériques, amoureux d’une belle Juive entr’autres belles rencontres de hasard, correcteur des Prolégomènes « du docte Juif nommé Léo Belmonte », pleurétique ballotté par la vie jusqu’à sa mort solitaire.
« …] j'ai toujours cru qu'entre simples et sages, le seul fossé était de vocabulaire. »

Une belle matinée c’est le moment où Lazare, le fils de Nathanaël, part à douze ans jouer les rôles féminins de Shakespeare, rêvant par avance ses incarnations de comédien.

Postfaces : Marguerite Yourcenar évoque la genèse de ces textes. Celle d’Anna, soror… est ancienne, ce récit demeurant cependant actuel pour son auteur après plus de cinquante ans ; l’histoire du thème littéraire de l’inceste est aussi retracée.

Mots-clés : #nouvelle
par Tristram
le Mar 3 Déc - 12:00
 
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Colette

La femme cachée

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 La-fem10


Recueil de nouvelles,
de 1924, pour la date de première édition. Elle avait donc 51 ans.
Ce receuil est inégal, c'est à dire que chaque nouvelle a toujours des fulgurances, mais la perfection de leur construction est variable , la moitié est épatante, l'autre juste très agréable.

Le point commun du recueil, comme son nom l'indique, un biais sur l'"éternel féminin" , en couple ou non. Excepté une nouvelle, appelée "Le renard", qui met en scene deux hommes proprietaires l'un d'un renard apprivoisé, l'autre d'un couple de poules/coqs.
Je reste très impressionnée par le style de cette femme.
Du coup je vous recopie une des nouvelles. Tout simplement. Je ne sais pas quoi dire en commentaire, Colette c'est Colette, quoi. On connait.

Hop. je recopie ci dessous "La femme cachée", la nouvelle qui donne son titre au recueil.


Mots-clés : #nouvelle
par Nadine
le Mer 27 Nov - 19:54
 
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Sujet: Colette
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Truman Capote

L'été indien

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 M0286910


Juste pour me faire plaisir : passer un moment avec l'écriture de Truman Capote. Je ne m'en lasserai jamais.

Petit livre, la taille d'une nouvelle mais qui laisse tant de mélancolie, tant de tristesse partagée face à un choix de vie imposé par le père de famille.
En même temps, récit si descriptif du paysage qui environne les personnages qu'on referme le livre, persuadé qu'en levant les yeux, c'est certain, il neige dehors.
Il neige comme dans le récit, comme dans le coeur du grand-père, comme dans celui de l'enfant.


Mais il reste un secret à partager...



Mots-clés : {#}nouvelle{/#}
par Invité
le Ven 22 Nov - 18:57
 
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Sujet: Truman Capote
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John Fante

Grosse faim

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Grosse10

On rencontre plusieurs fois le jeune Arturo Bandini dans ces 18 nouvelles inédites et publiées à titre posthume, datées de 1932 à 1959 :

Quel plouc, ce Dibber Lannon !
« Un jour, je suis allé avec Dibber à la maison hantée, au bord de la rivière. On avait des frondes pour tuer les fantômes. »

Le copain du narrateur prétend que son frère sera le prochain pape. Dans cette nouvelle comme dans la suivante, on mesure comme John Fante savait rendre justement, sensiblement l’esprit des gamins, avec humour, mais aussi parfois amertume.
« Je le connaissais. On me la faisait pas. Je savais à quoi ressemblait ce gars-là. Comment il zigouillait les poulets et les chatons. Je savais tout ça. Peut-être qu’il allait bel et bien devenir prêtre, mais ce serait certainement pas un prêtre modèle. Je voyais encore le chaton mort. On peut pas faire un truc pareil et être sanctifié. Jamais de la vie. »


La Mère de Jakie
Incipit :
« Bon, si j’avais une mère comme celle de Jakie Shaler, je ferais quelque chose. Je ferais quelque chose de vraiment bizarre. Je me mettrais aussi sec à la recherche d’une autre mère. »

L’enfance maltraitée, aussi confrontée à la mort.

Les voix encore petites
Scène de ménage nocturne, dont profite toute la famille.

L’Ardoise
C’est celle, chez l’épicier, que doit gérer la mère dans la famille nombreuse d’un pauvre maçon rital…

Le Criminel
Il s’agit d’un bootlegger ‒ dans le plus pur style, voire caricaturalement, italien…
« Si l’un de nous autres, les gosses, osait seulement pousser le moindre soupir un peu sonore durant cet accès de fureur, papa s’emparait aussitôt d’un couteau et menaçait de nous trancher la gorge. Même si cette menace effrayante fut proférée trois à quatre fois par semaine pendant toute notre enfance, elle connut sa concrétisation la plus probante le soir où il lança une boulette de viande vers mon frère Dino. »


Une femme de mauvaise vie
Une possible mésalliance révolutionne le « clan […] victime d’une crise d’hystérie collective »…

Un type à l’intelligence monstrueuse
Le samedi soir (drague, danse et bières) d’un jeune manœuvre prétendant écrivain qui pense surtout à ses lectures, dont Nietzsche.

Lavé sous la pluie
Un petit employé rêve à ses pitoyables amours :
« Je tombe amoureux de femmes qui ne le savent pas. »


Je suis un écrivain de la vérité
Le narrateur-je (c’est le procédé privilégié de Fante) est un pédant écrivain épris de vérité ‒ incipit, et reprise d'icelui :
« La vérité est souvent désagréable, mais il faut la dire. Dans le cas présent, la vérité c’est que Jenny n’est pas une jolie fille. Elle est l’héroïne lamentable de cette nouvelle. Elle est petite et grosse, couverte de bourrelets de graisse. Sa bêtise dépasse les pouvoirs descriptifs de ma plume. »

« Si vous l’interrogiez, Jenny serait incapable de se rappeler le moindre mot de tous mes grands monologues. C’est une vraie tragédie. Car j’ai souvent dit de belles choses, me surprenant parfois moi-même. Je suis incapable de m’en souvenir maintenant, mais je me rappelle que sur le moment elles étaient spectaculaires, magnifiquement ciselées, dignes d’être mémorisées.
J’ai déclaré plus haut que je souhaite dire la vérité. Je dois maintenant faire un aparté pour reconnaître que j’ai échoué. J’ai dit que Jenny est grosse et laide. Ce n’est pas tout à fait exact, car Jenny est tout sauf cela. Oui, Jenny est une vraie beauté. Elle est mince et souple. Son attitude est aussi arrogante que celle de la rose. C’est une joie de l’avoir auprès de soi. »


Prologue à Demande à la poussière 
« Inutile de chercher à fabriquer une intrigue pour cette histoire, mon second roman. Tout cela m’est arrivé. Cette fille est partie, j’étais amoureux d’elle et elle me détestait, et voilà mon histoire. Demande à la poussière sur la route. »

La triste histoire d’amour torturé qui va devenir Demande à la poussière : un très beau texte qui parle de l’inégalité des chances dans une société hiérarchisée selon l’identité ethnique, rappelant notre actualité ; d’autodérision et de rêve de gloire chez l’auteur ; de Los Angeles et sa Bunker Hill.
« J’intitule donc mon livre Demande à la poussière parce que la poussière de l’Est et du Middle West est dans ces rues et c’est une poussière où rien ne poussera jamais, une culture sans racines, un désir forcené de se barricader, la vaine fureur de gens perdus et désespérés qui meurent d’envie d’atteindre une terre qui ne leur appartiendra jamais. Et une fille égarée qui a cru que la frénésie rendait heureux, et qui a voulu avoir son lot de frénésie. »

« L’amour à petit budget, une héroïne gratuite et pour rien, à se rappeler à travers un hublot où nagent truites et grenouilles. »

« La Faim de Hamsun, mais ici c’est la faim de vivre dans une contrée de poussière, la faim de voir et de faire. Oui, La Faim de Hamsun. »

Et là on se ramentoit vivement Henry Miller…

Un trajet en car
Dans la peau d’un saisonnier philippin qui voyage de nuit en car.

Mary Osaka, je t’aime
Ostracisme entre Américains… d’origine philippine et japonaise ; un amour pourtant, puis survient Pearl Harbour…

Valenti apprivoisé
Passion à l’italienne : alternance de violente jalousie et d’amour ardent.

L’Affaire de l’écrivain hanté
Superstition, peut-être aussi d’origine italienne ?

Le rêve de Mama
Superstition encore, aux conséquences burlesques dans cette parodique famille italienne.

Les Péchés de la mère
Le vrai pouvoir, celui de la Mama ‒ ici impétueux, excessif, surtout quand son poids s’ajoute à celui de la coutume.

Grosse faim
John Fante retourne dans l’esprit d’un enfant, ses fabulations, sa perception du monde et… sa conception de l’alimentation.

Mon premier voyage à Paris
Rencontre d’une vieille misérable en souffrance dans la rue ; il s’avère que
« Elle ne désire rien, sinon qu’on la laisse tranquille avec sa douleur. »

A son habitude, Fante mêle les faits, souvent autobiographiques, finement observés, et la fiction qu’il en tire ; comme de coutume, c’est son style si particulier qui fait sa différence : laconisme, reprises, et surtout cette petite note humaine, impossible à préciser, glissée entre les mots.

Notez bien que Des choses à lire vous a gracieusement offert la table des matières de cet ouvrage (peine que pratiquement aucun éditeur ne se donne plus).  
Arturo, you guy owe me a couple o' beers...

Mots-clés : #enfance #famille #immigration #nouvelle
par Tristram
le Mer 2 Oct - 0:22
 
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Sujet: John Fante
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Vues: 3547

Jules Renard

Sourires pincés

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Sourir10

I. Pointes sèches : Les poules - Les perdrix - Aller-retour - Sauf votre respect - La pioche - Les lapins - La trompette - Le cauchemar - Coup de théâtre
Dans la dernière brève pièce, apparition de Poil-de-Carotte, le petit mal-aimé (autobiographique ?) de la famille :
« Scène V
Poil-de-Carotte
(Au fond d'un placard. Dans sa bouche, deux doigts. Dans son nez, un seul. Etat d'âme à la M. Paul Bourget.)
Tout le monde ne peut pas être orphelin. »

II. Ciel de lit (des distances à respecter dans le lit conjugal)

III. La mèche de cheveux (délicieuse petite pièce, plus désopilante que baudelairienne ; j’ai envie de la citer intégralement…)

IV. Sourires pincés : Le pêcheur - Les vers luisants - L'herbe - Les bœufs - L'affût - La vendange - Le pêcheur à la ligne - Les moineaux
L’avant-dernière scène, in extenso :
« Les ruisseaux accourent au bassin où se repose la rivière. L'un apporte le murmure câlin de ses joncs ; l'autre, sur un mince filet clair, pur de toute boue, écrémé sous les dents de la roue du moulin, tout essoufflé et comme toussotant, pour avoir tant sauté de cailloux, apporte le plain-chant des canards du village, tandis qu'au milieu du bassin, où s'égrène un vol de mouches, les poissons font des ronds à fleur d'eau, paillètent, et, repus, loin des bords, se demandent entre eux à quoi s'occupe ainsi le pécheur à la ligne ? »

V. La demande

VI. Les joues rouges

VII. Les petites bruyères : Gens des deux sexes - Gens de métier - Gens du monde

VIII. Baucis et Philémon

IX. Le coureur de filles

Instants saisis à la concision de haïku ‒ travail à l’os comme brièveté des saynètes ‒, observations précises jusqu’au venin, humour savoureux mais pointes fort sèches…

Mots-clés : #famille #nouvelle #ruralité #xixesiecle
par Tristram
le Sam 28 Sep - 22:32
 
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Sujet: Jules Renard
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Eric Holder

Masculins singuliers

Nouvelles, 140 pages environ, 2001, éditions Le Dilettante.

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 C_masc10


Huit nouvelles, parfois de courtes proses, parfois un texte plus long, étoffé. Le titre est fort heureusement choisi, il s'agit de la singularité de différents caractères masculins. Ils campent de belles rencontres, au résultat un peu désastreux il est vrai - pas toujours.

On retiendra Emilio, l'ange retraité aux mains calleuses de la nouvelle éponyme qui ouvre le recueil, Joachim, le maçon portugais de celle qui le clôt (intitulée Un roi sans divertissement, est-ce "pour saluer Giono" ?), Dominique, le militaire solitaire et motard de Champagne -belle nouvelle, la plus longue, l'échafaudage du non-retour de Quatre jours de sport et cette curieuse et drôle - truculente dirai-je - Corrida:

La corrida a écrit:Bien sûr, ce n'était pas un taureau, c'était pire, c'était une vache, c'est-à-dire un animal paisible qu'on retrait le soir à l'étable, et qu'on emmenait à l'abattoir avec plus de facilité qu'un mouton, pour peu que le maquignon ne fût pas vêtu de noir. Un symbole d'accommodement, de fertilité, la généreuse mère nourricière qui donnait tant le lait que la viande. Ce n'était plus la crainte qu'on lisait dans le regard des hommes, c'était la stupéfaction. Ils perdaient leurs repères. Déjà, quand j'avais dit, en manière de plaisanterie, on n'a qu'à la laisser dans le bois, il n'y vient jamais personne, elle vieillira tranquille, on m'avait regardé d'un sale œil. On ne laisse pas vieillir les vaches dans les forêts. Les vaches ne foncent pas sur les gens. Ce n'est pas dans l'ordre des choses, et cet ordre des choses, les hommes allaient maintenant le remettre à l'endroit.



Au final une fort agréable lecture, sous des airs de clarté, de précision et de concision Holder embarque bien son lecteur, je commence à mieux me familiariser avec son style épuré, efficace et m'exclame "Encore !" tel l'affamé arrivé au dessert mais dont l'estomac se croit toujours aux hors-d'œuvres.



Mots-clés : #nouvelle
par Aventin
le Dim 22 Sep - 9:50
 
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Sujet: Eric Holder
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Horacio Quiroga

Anaconda et autres contes

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Anacon10


Puisque les éditeurs (ici Métailié) ne se donnent plus la peine d’insérer une table des matières dans leurs publications, je vous la donne ici :

Anaconda
Le Simoun
Le marbre inutile
Gloire tropicale
Le yaciyatéré
Les fabricants de charbon
Le Monte Negro
Dans la nuit
Les raies
La langue
Le vampire
La tâche hyptalmique
La crème au chocolat
Les hannetons
Le Divin
Le chant du cygne
Diète d'amour
La poulie folle
Miss Dorothy Philips, ma femme


Le texte éponyme du recueil narre la guerre des serpents contre les humains. Les histoires d’animaux anthropomorphisés (les bêtes qui parlent) est un procédé brillant chez Jean de la Fontaine, qui parle des mœurs des hommes, et dont les erreurs d’éthologie animale n’ont pas d’incidence. La méthode est plus douteuse quand elle est appliquée à des animaux inconnus de la plupart des lecteurs, et qu’en plus s’y ajoutent des bévues dans l’observation de leur comportement. Il faut donc lire Anaconda comme un conte, pas une fable…
Les textes suivants sont plus courts (sauf le dernier), et davantage du registre de la nouvelle ; ils n’évoquent pas tous le rio Paraná et la région limitrophe du Chaco, du Paraguay et du Brésil, mais aussi l’Afrique du Nord ou Centrale.
Les histoires d’aventuriers (Les fabricants de charbon, Le Monte Negro), de superstitions (Le yaciyatéré) et fantastiques (Les raies), de folie (Le vampire), alternent avec ce qui doit être des souvenirs de son existence à Misiones (La crème au chocolat) ou un exercice parodique (Miss Dorothy Philips, ma femme).
Dans la nuit est un texte superbe qui rend justice autant à la majesté d’un fleuve qu’à la pugnacité d’une héroïque batelière, condensant nature grandiose et humble humanité.
Il vient simplement de ce que l’on croit, comme parole d’Évangile, que l’Administration est une machine avec des poulies, des courroies, des engrenages tous si intimement liés que l’arrêt ou le simple défaut d’une minuscule roue dentée est capable de bloquer le merveilleux mécanisme. […] La machinerie est merveilleuse et chaque homme en effet est une roue dentée. Mais les trois quarts d’entre elles sont des poulies folles, ni plus ni moins. Elles tournent aussi et semblent solidaires du grand jeu administratif, mais en réalité elles font des tours dans le vide et quelques centaines d’entre elles pourraient s’arrêter sans causer la moindre perturbation. »

« Les gens du Sud disent que le yaciyatéré est un gros oiseau disgracieux qui chante la nuit. Je ne l’ai jamais vu, mais je l’ai entendu mille fois. Son chant est très pur et mélancolique. Répétitif et obsédant comme nul autre. »


Mots-clés : #nouvelle
par Tristram
le Lun 16 Sep - 20:39
 
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Sujet: Horacio Quiroga
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Patrice Franceschi

Première personne du singulier

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Premiz10

4 nouvelles, 2015.
Elles sont reliées par un thème, celui du choix drastique, causant trépas, dans deux de ces quatre nouvelles trépas de ce qu'on a de plus cher.

Assez jolie langue, appréciable style classique. La première, celle du choix du capitaine Flaherty, est de très haute tenue, captivante, tout à fait digne de figurer auprès de grands écrits ayant trait aux gens de mer, vraiment dans la lignée des Conrad, Melville, Loti, Stevenson, etc...

La seconde, celle du capitaine Vernaud, jeune officier pétri de Victor Hugo et cherchant gloire et honneur en pleine débâcle de 1940, croise un poème qui trotte dans la tête de l'officier avec des ordres reçus, une situation donnée, un acte héroïque mêlé d'absurde.

Pour la troisième, assez stevensonnienne, l'auteur a cru bon de fouiller un peu plus le caractère du protagoniste principal, le marin Wells, en menant la nouvelle sous la plume d'un journaliste enquêtant sur un naufrage classé sans suite.

La dernière, celle qui m'a le moins touché, stylistiquement parlant j'entends, narre une situation désespérée, quinze minutes de la vie de deux résistants, qui ne se connaissent pas 'Madeleine et de Pierre-Joseph) et vont en quelque sorte tomber amoureux en se rencontrant, avec chacun leurs deux enfants, dans la file d'attente d'un train les menant en camp de concentration.

Pour l'ensemble, c'est total ravissement que de tomber sur un écrivain-aventurier, doté d'une plume de belle qualité, pas chichiteux, média-machin ni nombrilo-centré (tout au contraire même).  
Je me suis interrogé sur la raison (s'il y en a une) qui me fait préférer les deux nouvelles de mer aux deux autres: sans succès.
Peut-être n'espérai-je pas tomber sur un écrivain de mer de cet acabit, qui fût français et contemporain de surcroît.

À recommander sans réserve, cette Première personne du singulier devrait combler bien des amateurs de nouvelles, et de littérature en général.


Mots-clés : #nouvelle
par Aventin
le Dim 8 Sep - 9:05
 
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Sujet: Patrice Franceschi
Réponses: 7
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Gilbert-Keith Chesterton

Petites choses formidables

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Cheste10

Un de moins, parmi les ouvrages non traduits en français de Chesterton, dont je regrettais un peu plus haut sur ce fil qu'ils soient si nombreux; certes celui-ci n'atteint pas aux apothéoses de L'Auberge Volante, ni même à celles du Napoléon de Notting Hill ou de La sphère et la croix, Un nommé Jeudi, etc... mais tout de même, c'est appréciable cette série d'article précédés d'une préface pour le Daily News, choix de textes, traduction, notes d'André Darbon, éditions Desclée de Bouwer 2018.
Très chroniques libres ou billets d'humeur à tendance essayiste, ces 240 pages (environ), soit 39 articles ou courtes nouvelles, pas uniquement destinées aux inconditionnels.

Quel art que celui consistant à partir de petits riens du quotidien (un morceau de craie, du lierre, une gare en campagne, un sosie d'un homme célèbre, etc...) pour aboutir à une petite démo édifiante, dont l'humour et le contrepied ne sont jamais absents, et de le faire avec une telle légèreté et une telle liberté de ton !

Nous promenant en sa chère Angleterre bien sûr, mais aussi en France, en Belgique, en Allemagne avec sa désinvolture émerveilleuse, l'on passe un bien agréable moment, trop court, cependant: en effet le livre se dévore...


Un extrait, les risques du tabac ne sont pas toujours ceux que l'on croit !

La tragédie des deux pence a écrit:En tous cas, je ne parlais pas un mot d'allemand, en ce jour noir où je commis mon crime - ce qui ne m'empêchait pas de déambuler dans une ville allemande; [...].
Je connaissais cependant deux ou trois de ces excellents mots, pleins de solennité, qui donnent sa cohérence à la civilisation européenne (notamment le mot "cigare"). Le jour était onirique et chaud: je m'assis donc à la table d'un café,  et commandai un cigare et un pichet de bière blonde.

Je bus la bière et la payai. Je fumai le cigare, oubliai de le payer, et partis le regard euphorique posé sur les montagnes du Taunus. Après quelques dix minutes, il me revint à l'esprit que j'avais oublié de payer le cigare. Je retournai à la buvette et y déposai l'argent.
Mais le propriétaire avait lui aussi oublié, et il me posa une question dans sa langue gutturale - sans doute me demandait-il ce que je voulais. Je lui répondis "cigare" et il me donna un cigare. Je m'efforçai de lui expliquer par gestes que je refusais son cigare, et lui crut que je condamnais ce cigare-là, et m'en apporta un autre. J'agitai les bras comme un moulin, par un balayage plus universel, à lui expliquer que c'était un rejet des cigares en général, et non d'un article en particulier.
Il prit cela pour l'impatience caractéristique des hommes communs, et revint, les mains pleines de divers cigares qu'il me colla au nez. De désespoir, j'essayai toutes sortes de pantomimes, et je refusai tous ceux, de plus en plus rares et précieux, qu'il sortit des caves de son établissement. Je tâchai sans succès de lui faire comprendre que j'avais déjà eu mon cigare. Je mimai un honnête citoyen qui en fume un puis l'éteint et le jette. Le vigilant restaurateur crut que, dans la joie de l'expectative, j'étais seulement en train de répéter à l'avance les gestes bienheureux que je ferais une fois en possession du cigare.

Finalement j'abandonnai, découragé: il ne voulait pas prendre mon argent et laisser ses cigares tranquilles. C'est ainsi que ce restaurateur, sur le visage duquel brillait l'amour de l'argent comme un soleil de midi, refusa fermement les deux pence que je savais lui devoir. Je lui ai repris, et les dépensai sans compter durant les mois qui suivirent. J'espère qu'au dernier jour des anges apprendront très doucement la vérité à ce malheureux.         




Mots-clés : #absurde #humour #nouvelle #xxesiecle
par Aventin
le Jeu 5 Sep - 23:07
 
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Sujet: Gilbert-Keith Chesterton
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Carlos Liscano

Le rapporteur et autres récits

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Le_rap10

Un mendiant défend sa place face à un vigile.
Ayant été ramassé ivre par la police, le narrateur a donné un faux nom. Emprisonné jusqu’à ce qu’il avoue son vrai nom, d’ailleurs connu de la justice, un juge lui rend visite chaque année, et des rapports très courtois les unissent au fil des ans ; ainsi, le prisonnier s’apprête avec humour à écouter les confidences du magistrat :
« Ce qui se dira ici ne sortira jamais de ces murs. »

Une réunion en bonne société engendre ou pas « un petit animal social » utile aux relations humaines.
Dialogue beckettien de Ku et Ke, qui jouent aux idiots, l’un entraînant l’autre, puis l’inverse.
Une famille où l’on se vend, de père en fils et réciproquement.
Synopsis (austerien) :
« Si nous pouvions voir la nuit depuis les hauteurs, nous constaterions que nous somme maintenant quatre et que nous n’avons besoin que d’être quatre : celui qui tue, le mort, celui qui écrit, celui qui lit. Deux hommes se sont cherchés dans la nuit. Lentement, ils ont marché sous la pluie en dessinant avec leurs pas une figure secrète. Quand cette figure trouvera sa forme définitive, la nuit sera finie pour l’un d’entre eux. Et l’histoire sera finie. Nous ne serons plus que trois. »

L’auteur chez le dentiste en Suède (Liscano s’est réellement exilé là au sortir de prison dans son pays, où il a été torturé) : son dentiste, « la tentation des ténèbres », le martyrise longuement (d’ailleurs il tue le premier ministre suédois). Un texte plus long, kafkaïen, qui témoigne excellement de la perception transformée du vécu.
Un onirique étendage de linge devient universel.
Le récit éponyme, lui aussi assez long, mais bizarrement gouailleur par moments, rapporte l’arrestation, la séquestration avec sévices de qui pourrait être l’auteur, contraint à parler, puis à écrire… des rapports… Il semble que ce soit une sorte de journal justement consigné en prison pour conjurer le dénuement, le non-sens et la folie qui le guette au moyen de l’écriture, que Liscano interroge elle-même.
« Les chemins sont déjà plus ou moins tracés. Par d’autres qui sont passés avant nous, et on les prend à notre tour. On ne choisit pas tout ce qu’il y a sur le chemin. Ce sont les chemins qui s’imposent à nous. Moi, mon chemin m’a amené jusqu’ici. Je ne proteste pas, mieux vaut un chemin que pas de chemin du tout, mais il aurait pu être meilleur. »

« Je demande qu’on me prenne comme je suis, avec mon style particulier, pas avec celui d’un autre type, du premier cochon venu qui écrive dans le coin.
Qu’il me soit permis de développer un peu cette idée, de lui apporter des nuances, un peu de relief, de faire qu’il y ait des tenants et des aboutissants. On a son style et les autres ont le leur, chacun le sien. Si on n’avait pas de style propre, on ne serait pas comme on est, on serait quelqu’un d’autre, avec un style différent. Alors le style est quelque chose de fondamental, c’est ce que je suis en train d’expliquer. J’ai mon style, qu’on le croie ou non, mais c’est la vérité. Et je m’efforce de garder le style qui me caractérise, sinon rien n’aurait de sens, rien ne vaudrait la peine, nous perdrions notre temps. »

« C’est le Blond qui commande et il disait que je devais parler. Et après que je devais écrire. Voilà le problème, c’est comme ça qu’il se posait.
De quoi puis-je parler ? me demandais-je. De quelque chose. Il voulait savoir, ça n’avait aucune importance pour moi. Ce n’est pas que je ne savais pas, ou que je savais et que je ne voulais pas répondre, ou quelque chose comme ça. Non, c’était que, me disais-je, à quoi bon parler quand tout a déjà été dit ? »

« C’est cela, on essaye de tirer le meilleur parti de la vie. Si mauvaise que soit votre vie, vous essayez d’en tirer le plus possible. Il n’y en a pas d’autre. »

Dans ce recueil de nouvelles qui jouent de plusieurs registres, tout est étrange, et difficile à partager...

Curiosité : mon exemplaire porte la mention suivante : ÉPREUVES NON CORRIGÉES. Je ne garantis donc pas l’exactitude des extraits que j’en ai cité.

Mots-clés : #absurde #captivite #ecriture #nouvelle #solitude
par Tristram
le Mer 14 Aoû - 16:36
 
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Sujet: Carlos Liscano
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T.C Boyle

25 histoires de mort

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 25-his10

25 nouvelles regroupées autour d’un thème, ici écrites entre 1979 et 2001 et chacune de 20 à 40 pages environ, c’est le principe de quelques recueils de T. C. Boyle, dont celui-ci.
La première, Gros gibier, met en scène de riches amateurs de safari dans une propriété californienne qui a opportunément recueilli quelques vieux animaux de cirque ou de zoo : un vrai carnage. C’est acerbe, et hilarant (et toujours d’actualité).
Tueur de bébés : un jeune à la dérive est placé par le tribunal chez son frère aîné, un médecin qui lui donne un petit boulot dans sa clinique. Mais il est immédiatement confronté aux « frappés de Jésus » haineux qui s’en prennent activement à l’avortement. Saignant.
Le Mexique : comment un séjour au Mexique et pas mal d’alcool peuvent éveiller une tendance suicidaire à la violence.
Capturés par les Indiens : toujours et partout, la violence et la cruauté ordinaires aux hommes.
L'Amour de ma vie : le grand amour partagé de deux étudiants prometteurs, détruit par une grossesse non désirée aboutissant à un sordide avortement clandestin. Émouvant.
Lac Greasy : quand les trop jeunes jouent les méchants.
Tranquillité d'esprit : une vendeuse d'alarmes alimente la paranoïa de ses clients potentiels en rapportant de sanglants faits divers, exaspérant ainsi un psychopathe qui réagit… violemment.
« ‒ Y vous enfoncent vos sous-vêtements dans la bouche, murmura-t-elle. Y a pas pire que ça. Tu te rends compte le goût que ça doit avoir ? Tes sous-vêtements dans la bouche ? »

Le roi des abeilles : une adoption qui tourne mal…
La maison qui coulait : la profonde dépression de celui qui reste seul.
Le Diable et Irv Cherniske : faire des affaires avec le Diable reste risqué.
La Mouche humaine : un casse-cou qui veut à tout prix atteindre à la célébrité.
Long cours : la paranoïa mène aussi au survivalisme, et donc à l’auto-défense (un fructueux bizness) ‒ mais, évidemment, pas qu’une seule personne…
Les 100 visages de la mort, volume IV : cynisme et insensibilité devant les différentes morts.
« La conversation roula sur le nez de Jamie, les sangsues, le transit intestinal et la mort. »

Little America : un vieillard, descendant d’un explorateur polaire, s’égare et devient victime d’un clochard. Burlesque et abject.
L’enfer aux trousses : un joueur de blues du vieux Sud déchaîne la jalousie féminine. Extraordinaire description de l’agonie d’un chien empoisonné.
Ça ne tient pas debout : un vieillard apprécie sa retraite chez les petits voyous.
Me cago en la leche… ou Robert Jordan au Nicaragua : quand on joue au révolutionnaire en Amérique du Sud.
Extinctions : celles des espèces animales massacrées par l’homme (mais ce qui est dit des pigeons est invraisemblable). La vaine tentative de sauvetage des Tasmaniens (les humains, pas les loups). Relativisme des extinctions.
La dame aux singes part en retraite : une éthologue est revenue au pays prendre sa retraite ‒ mais recueille Konrad, un chimpanzé "dénaturé".
L’homme de brumes : comment les enfants savent exclure l’étranger, même contre l’opinion de leurs parents.
Rara avis : survenue d’un grand oiseau inconnu, éveil de la libido ‒ et de la violence.
Le manteau II : référence évidente à Le Manteau de Gogol, où l’on retrouve Akaki en petit gratte-papier soviétique, zélateur du Parti, et finalement victime de la corruption endémique (et contre-révolutionnaire).
L’homme rouillé : encore un vieillard, enfin un couple, qui agonisent ensemble ; il y a fins plus clémentes.
Ce n’est plus cool : dépit de has been ?
« Et c’était sa plage, à lui… ou à la communauté, et la communauté, il en était membre, il versait assez d’impôts chaque année [… »

« C’était en Californie qu’on était, au royaume des plages, là où, avec ses tongs à un dollar vingt-neuf et sa chemise délavée, le mec assis sur le tabouret d’à côté vaut probablement plus que le PNB d’une demi-douzaine de pays du tiers monde mis ensemble. »

Ma veuve : le narrateur, un mort observe sa veuve, non sans une certaine tendresse.

À déplorer une traduction un peu défectueuse par endroits.
J’avais déjà lu Si le fleuve était whisky, recueil contenant d'ailleurs plusieurs des nouvelles réunies dans celui-ci.
T. C. Boyle est un excellent novelliste, et chacune de ses histoires se révèle fort originale, densément ramassée. Ses personnages, rapidement campés, tiennent admirablement debout ; c’est de plus un remarquable observateur de la société. Ses métaphores sont caractéristiques de son style. Beaucoup d’humour, voire de cynisme, assez noir, et finalement... triste.


Mots-clés : #nouvelle
par Tristram
le Jeu 1 Aoû - 1:05
 
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Irène Nemirovsky

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Dimanc10

Dimanche

Dimanche est un recueil posthume des nouvelles d'Irène Nemirowski.
Recueil un peu hétérogène puisque l'auteur n'a pas pu choisir elle-même.
Mais c'est une bonne introduction à l'oeuvre romanesque, et une nouvelle comme Aino est véritablement envoûtante.
Peut-être parce qu'elle m'a semblé autobiographique - comme d'autres nouvelles - et que Nemirowski n'est jamais aussi bonne que lorsqu'elle parle d'elle-même et de ce qu'elle a vécu.


Mots-clés : #nouvelle
par bix_229
le Dim 21 Juil - 20:52
 
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Ryûnosuke AKUTAGAWA

Rashômon et autres contes

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Rashzm10


Ces contes relèvent du fantastique, comme l’éponyme, et même du policier comme le fameux Dans le fourré, mais aussi d'un humour qui fait songer à Gogol, et pas seulement à cause des évocations de nez…
Les Kappa est une longue nouvelle, une satire sociale rappelant Swift ; Akutagawa y donne aussi un aperçu de son intéressante perception des écrivains occidentaux :
« ‒ C’est un de nos saints… saint Strindberg, qui se révoltait contre tout. »




Mots-clés : #contemythe #fantastique #humour #nouvelle #polar
par Tristram
le Ven 12 Juil - 14:03
 
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Jean-Loup Trassard

L'ancolie

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Ancoli10

9 nouvelles

Les patiences du bord de l'eau : chaleur, humidité, les fermiers souffrent, les cultures s'abîment et dans cet univers une jeune fille disparaît près de l'étang, sous l'oeil d'un héron cendré ; que s'est-il passé ? fuite ? enlèvement ? autre ?

"Parce que nu, son corps - environné d'une vaste tièdeur humide et par elle comme vêtu - ne devait pas sembler différent de l'eau dans laquelle il entrait. Parmi les nénuphars, lentement, passait le reflet de ses seins. Là sans doute elle vit l'oiseau, à l'envers rien qui fût distinct, des ailes fermant le ciel l'enveloppèrent un instant."

"L'oiseau qui revenait au nid de plumes l'apercevant ainsi étendue lâchait le serpent qu'il tenait, au-dessus d'elle ouverte planait avant de se poser. Tout autour s'élevaient les cigües vireuses. Sur les bords où l'étang avait dépsé la semence en hiver, les oseilles formaient des graines vertes. Tout autour le silence était troublé lentement par çà et là des coassements sourds, des bulles en éclosion, un retournement de queue dans l'eau, le cri bref d'un râle invisible."

"A part une trace de pied nu qu'ils (les fermiers) disaient certaine, ils ne trouvèrent que, pris à la boue, un livre sans couverture - épais, les pages réunies - qui me fut ensuite apporté. L'imminence d'un envol, dont l'envergure les couvrirait, avait de quoi rendre précautionneux."


Reconnaissance des dehors et des dedans d'une forêt


Le narrateur fait la reconnaissance active, physique des dehors d'une forêt,  tandis qu'un écrivain lui en reconnait les dedans en créant une forêt dans son roman ;  une forêt où l'on se perd volontairement ou non.

L'écrivain :
"S'il avait vécu dans la forêt il n'aurait pas eu celte envie de la changer en mots. Les mots qui l'évoquaient, puis la représentaient étaient preuve même de la forêt."

"Et que le papier sur lequel il écrivait fût pour une grande part fabriqué de bois - si bien qu'avec l'aide du hasard il écrivait peut-être la forêt sur le bois qui en était issu - lui paraissait faire de cette forêt contenant d'avance le support du texte qui la créait, un bloc irréductible, lieu d'une protection infinie."


le narrateur qui visite la forêt :

"La forêt ceinte à son pourtour de lianes fleuries, des hérissons y dorment en boule serrés sur les poils doux de leur ventre au fond de terriers bourrés de feuilles sèches. Elle fait une vaste trouée sombre dans la brume qui se déchire sur les branches et parait entre les troncs rassemblés plus légère. Nul ne s'approche alors, par crainte de se trouver pris, d'errer parmi les arbres vêtus de voiles et d'être, la nuit, fixé au piège des épines."

Le cerceau de bois

La maison, ceux qui y vécurent et y moururent et le narrateur : "le vent habite la maison plus que moi la nuit durant."

"Elle avait l'homme, l'enfant, de coussins elle rendait les fauteuils creux."

"Maintenant ils sont partis. Dix coups pour un homme, six pour une femme. Parents, amis, serviteurs même, rien n'a tenu.  Maison ensorceleuse où tous moururent, et je devais rester. Je n'étais bien que là. Le jour obscur, l'herbe noire, les murs humides. Là."

"Maison, vos nappes froides tirées de l'ombre vers l'odeur des pavés de la salle à manger si fraîche aux fenêtres ouvertes sur l'été. Absence, absence, absence autour de la table. Il neige des regards éteints."


Un miroir des ornières

La commune où vit le narrateur doit adapté les nombreux chemins à la circulation d'aujourd'hui ; il propose donc d'en dresser la carte ; chemins abandonnés, chemins communaux, chemins à faire à pieds.

"Depuis les champs, quand on ne connait pas, c'est sans l'avoir soupçonné que l'on découvre, en passant la tête et les épaules par une brèche, ce couloir d'ombre. Les fermes vivent au bord. Il y a peu, une famille y faisait encore un monde suffisant et immobile sur la terre battue. On ne s'y parlait guère, semaine au long, ils se voyaient entre eux, et les bêtes."

"C'est ce qui me touche dans les chemins, ce pourquoi je voudrais qu'on les considère : leur existence personnelle. Ils ne sont pas là que pour aller d'un point à un autre. J'ai une préférence pour ceux qui vont nulle part, c'est-à-dire qui se perdent, à contourner les champs, à se diviser en fourche, finissent sur un raccordement oublié."


Harloup

Alors que dans la presse, à la radio les informations relatent la violence des guerres, grèves, conflits dus au racisme, le narrateur relève en dernière page l' abattage d'un loup par un berger pour la raison que l'animal avait égorgé une de ses brebis.

Partant de là le narrateur remonte sur des faits d'attaques remontant dans les temps anciens et les moyens mis en oeuvre pour les éradiquer. Evènements qui ont contribué à constituer certaines légendes.

"Après l'été pluvieux de 1661 la récolte fut nulle, le froment renchérit, un chroniqueur local dut écrire que si les habitants des deux villes tombaient morts de faim dans les rues, ceux des champs ressemblaient à des carcasses déterrées et disputaient aux loups leur pâture car lorsqu'ils trouvaient des bêtes crevées ils se repaissaient d'une chair qui les faisait plutôt mourir que vivre. Les paysans étaient réduits à paître et il y avait peu de nos chemins qui ne fussent bordés de corps morts, la bouche pleine d'herbe."

"Il fut remarqué que les loups connaissaient parfaitement la disposition du pays sur une large étendue et se voyant chassés tout de suite couraient aux lieux qui pouvaient les couvrir, et  longeaient les passages les moins fréquentés. Ce dédale de halliers, de chemins et de ruisseaux, de vieilles fermes pierreuses, leurs griffes l'ont usé. Quand la pluie rendait le bois froid, qu'à chaque branche pendaient des gouttes d'eau, les loups allaient par les sentiers de l'homme. Au temps sec ils coupaient à travers, leur fourrure les protégeant des arbres épineux."


D'un fût gélif

Le sabot, le travail sur le sabot et le travail du bois,  du fût au sabot.

"J'aurais pu prendre le quart de coeur et commencer à dégrossir pour amener peu à peu l'histoire. Une histoire qui n'en est pas une d'ailleurs, simplement l'aventure des mains sur le bois."

"L'affûtage, c'est l'âme des métiers du bois. Il se sert d'un tiers-point usé sur la meule. Fer contre fer. Pareil le mot s'aiguise d'affrontement, puis pierre douce au fond de la mémoire. Même les scieurs de la région venaient lui apporter leurs scies."


L'ancolie

Une femme et sa fille dans la maison, le jardin, travaux intérieur et extérieur au rythme des saisons ;  toutes les plantes sauvages qui entourent la maison et le ruisseau qui court. La journée du matin au soir.

"Vers l'avant sa robe se gonfle, s'ouvre un peu, fleur blanche au matin. Sous ses jambes allongées le ruisseau, encore froid malgré l'heure qui commence à pâlir tous les verts en une seule brillance de feuilles ou d'herbes. Sur le ventre bombé des prairies les pâquerettes passent d'extase. Elle sent le duvet argenté des menthes qui s'approche du secret de l'eau, son jeune poids de fille entre les parfums évoqués."

"Une fois par semaine, la laveuse revenue du douet avec une brouette pleine, devant midi le linge étendu au long du fil de fer dans le potager."

"Quand l'odeur de la cire franchit les fenêtres ouvertes, elle voit paraître sa mère, heureuse lasse d'avoir noyé sur les veines du bois sa durée fragile à celle des meubles."

Nos murs hourdés de terre

Travaux divers  de restauration des fermes et de leurs bâtiments (étables etc....)

"Nous avons cimenté l'allée des étables, creusé des puits, installé des fosses à purin, bâti des caves en appentis là où les tonneaux étaient dans les chambres, refait des planchers aux greniers et branché l'élecrticité. Car presque tous alors, qui soupaient à la lueur des trognons de choux, n'avaient qu'une lampe à pétrole posée dans la paille pour traire les vaches et pour les vélages de nuit."

"Des tempêtes, de longs hivers, tant d'usure. Le neuf est bien devenu vieux. Quant à l'ancien, depuis des centaines d'années les rats y sont en métayage."

"Autrefois, pour une location voisine, le fermier qui devait entrer avait détaché, poussé au chemin sous la pluie battante, le bétail de celui qui ne partait pas assez vite."

Canada

Les déplacements d'un coureur des bois, l'attente de l'arrivée de la neige.

"Il vivait, rien n'empêche qu'il vive encore, au bord et dans l'attente du moment où la neige recouvrant la campagne lui permettait de s'avancer dans un autre pays."

"Tous ses voyages étaient particuliers. Lorsqu'il y repensait ensuite, il faisait lever l'impression d'encore toucher la neige, la sève, la résine. Pourtant, plus que ces odeurs vivantes, c'était la certitude de s'être porté ailleurs qui surgissait."

"Ainsi l'attirance qu'il ressentait toute l'année, projets et préparatifs intérieur vers la neige même absente, était attente au bord d'une sorte d'éternité."



C'est une écriture aux tournures un peu surprenantes mais pleine de poésie.
L'ambiance est souvent à l'humide, les fermes, les maisons suent la tristesse, la pauvreté, l'isolement, souvent voulu.
C'est la désertification, mais l'auteur lui est revenu dans la région.
Les belles descriptions, la campagne, n'atténuent pas la pesanteur du mauvais temps ni des souvenirs d'un passé révolu.
Ces 9 petites nouvelles permettent de voir les saisons, le Temps qui laissent de profondes et irréversibles traces.
Nostalgique !









Mots-clés : #nouvelle
par Bédoulène
le Jeu 11 Juil - 21:41
 
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Sujet: Jean-Loup Trassard
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Leslie Kaplan

Désordre

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 Proxy192

Ca coûte 7 € avec un bandeau attrape-nigauds, et ça se lit en une demi-heure avec, pour ma part un début d’amusement très embryonnaire qui est resté sur sa faim. Je veux bien qu'il faut  que les éditeurs, les auteurs et toute la chaîne du livre vivent, mais il faut aussi que le lecteur s'y retrouve… J'ai eu la chance de ne payer que par mes impôts locaux puisque je l’ai emprunté en médiathèque, mais, bon, ça sent quand même un peu le foutage de gueule.

Dans une époque qui n'est pas la nôtre tout en étant la nôtre, soudain, des « crimes de classe » (au sens de la lutte des classe) se multiplient, constituant une expres​sion(de quoi, nul ne le sait) spontanée, sans caractère de mouvement. Leslie Kaplan prend un plaisir à énumérer les diverses crimes sur des résumés de deux à huit lignes, qu’elle intercale avec la réaction médusée et interrogative des médias et de la population. Le final est un retournement de situation qui n'apporte pas grand-chose à la sauce, un espèce de queue de poisson.

C'est une nouvelle, donc, et ce n'était par conséquent pas forcément pour me plaire, mais il me semble que, si c’est agréablement écrit,  c’est bâclé, à partir d'une seule petite idée d'origine, qui n'a pas du tout été creusée.Que le cocasse aurait pu être plus cocasse, le politique plus politique, la réflexion plus réfléchie.


Mots-clés : #absurde #nouvelle
par topocl
le Mer 10 Juil - 17:15
 
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Sujet: Leslie Kaplan
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Ryûnosuke AKUTAGAWA

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 51vsd410

Jambes de cheval

Akutagawa est un auteur-caméléon. Quelle que soit le décor, quelle que soit la nouvelle, il s'y fond et y laisse son emprunte. Nulle besoin de savoir que l'écrivain japonais a mis un terme à sa vie, durant laquelle il a été hanté par une folie héréditaire. On sent qu’un même visage narquois essaye tour à tour plusieurs masques, se déguise en ses personnages. Figures de Don Juan triomphants (on retrouve ici notre Heichû) ou ratés, d’hommes accablés par le vice, par la pauvreté ou par un malaise indéfinissable. Dans toutes ses nouvelles ― elles s’étalent sur 12 000 pages en japonais, on n’en possède qu’une petite partie traduite en français ― Akutagawa s’amuse de tout cela, abordant la rigueur du réel ou ses aspects énigmatiques, l’inquiétante étrangeté, source d’angoisse ; ou mêlant l’absurde, le cocasse au conte fantastique dans une délicieuse raillerie.

"Le chat, ou plutôt la femme, rougit. Dans ce mouvement d’émotion d’un instant, on retrouvait une vraie jeune fille. Non, ne pensez pas à une demoiselle de notre époque. Mais à une de ces jeunes filles telles qu’il n’en existe plus depuis cinq ou six ans, dans le goût des écrivains de la Société des amis de l’écritoire. Tout en cherchant de la menue monnaie, Yasukichi pensa à « Grandir ensemble », aux sacs à queue d’hirondelle, aux motifs d’iris, à Ryôgoku, à Kaburagi Kyokata, et à bien d’autres choses encore. Pendant ce temps, la femme, se penchant pour regarder sous le comptoir, cherchait les Asahi avec le plus grand zèle."


Mots-clés : #nouvelle
par Dreep
le Sam 29 Juin - 14:05
 
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Sujet: Ryûnosuke AKUTAGAWA
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Jules Supervielle

L'enfant de la haute mer

Tag nouvelle sur Des Choses à lire - Page 7 L_enfa11


Comment s'était formée cette rue flottante ? Quels marins, avec l'aide de quels architectes, l'avaient construite dans le haut Atlantique à la surface de la mer, au-dessus d'un gouffre de six mille mètres ? Cette longue rue aux maisons de briques rouges si décolorées qu'elles prenaient une teinte gris-de-France, ces toits d'ardoise, de tuile, ces humbles boutiques immuables ? Et ce clocher très ajouré ? Et ceci qui ne contenait que de l'eau marine et voulait sans doute être un jardin clos de murs, garnis de tessons de bouteilles, par-dessus lesquels sautait parfois un poisson ?
Comment cela tenait-il debout sans même être ballotté par les vagues ?
Et cette enfant de douze ans si seule qui passait en sabots d'un pas sûr dans la rue liquide, comme si elle marchait sur la terre ferme ? Comment se faisait-il... ?
Nous dirons les choses au fur et à mesure que nous les verrons et que nous saurons. Et ce qui doit rester obscur le sera malgré nous.
À l'approche d'un navire, avant même qu'il fût perceptible à l'horizon, l'enfant était prise d'un grand sommeil, et le village disparaissait complètement sous les flots. Et c'est ainsi que nul marin, même au bout d'une longue-vue, n'avait jamais aperçu le village ni même soupçonné son existence.
L'enfant se croyait la seule petite fille au monde. Savait-elle seulement qu'elle était une petite fille ?



L'Enfant de la haute mer

Tel est le début de ces drôles d'histoires en forme d'images kaléidoscopiques, avec un dosage subtil d'angoisse, d'humour faussement naïf.

L'entreprise de Supervielle m'a fait penser à celle d'un autre poète, André Dhotel.

Créer un pont entre le réel et l'irréel, la vie et la mort, tenter de retrouver l'univers imaginatif enfantin.

Un univers parallèle où l'on peut se réfugier quand le trop plein du réel nous étouffe et nous empêche de vivre.

Et donc de réclamer au lecteur une réconciliation de  l'enfant et de l'adulte.

Supervielle y parvient grâce à une qualité rare qu'on pourrait nommer grâce, à l'originalité de ses inventions, au ton et à l'imagination sans failles.

J'ai beaucoup apprécié aussi L'Inconnue de la Seine qui reprend un fait divers qui avait frappé l'imagination des surréalistes.

Une jeune noyée avait été repéchée, sans doute une suicidée. Mais ce qui avait frappé l'attention de tous, c'était son mystérieux sourire.

Supervielle l'imagine morte mais consciente, l'objet d'attention de mystérieux compagnons qui l'invitent à oublier le passé, à s'adapter, mais elle résiste.

"Grimaces affreuses de la vie, laissez moi tranquille, pensait-elle. Mais laissez moi donc tranquille ! Que voulez vous que je fasse de vous, quand le reste n'existe plus !"

Quand elle eut laissé loi derrière elle tous les poissons-torches et qu'elle se fut trouvée dans la nuit profonde, elle coupa le fil d'acier qui l'attachait au fond de la mer avec les ciseaux noirs qu'elle avait ramassés, avant de s'enfuir.

"Mourir enfin tout à fait", pensait-elle , en s'élevant dans l'eau.

Dans la nuit marine ses propres phosphorescences devinrent lumineuses, puis s'éteignirent pour toujours. Alors son sourire d'errante noyée revint sur ses lèvres. Et ses poissons favoris n'hésitèrent pas à l'escorter, je veux dire à mourir étouffés, à mesure qu'elle regagnait les eaux moins profondes.

Mais il faudrait citer aussi Les Boiteux du ciel, La Jeune fille à la voix de violon, La Piste et la mare.

A vous de vous faire une idée.

Moi j'ai envie de lire Le Voleur d'enfants.




Mots-clés : #litteraturejeunesse #nouvelle
par bix_229
le Jeu 20 Juin - 17:44
 
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Sujet: Jules Supervielle
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