Des Choses à lire
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Après tout une communauté en ligne est faite de vraies personnes, avec peut-être un peu plus de liberté dans les manières. Et plus on est de fous...


Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.

Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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La date/heure actuelle est Mer 8 Mai - 19:50

352 résultats trouvés pour famille

Miguel Bonnefoy

Sucre noir

Tag famille sur Des Choses à lire - Page 11 Image126

Nous sommes à la lisière de la forêt, dans un pays caribéen où, des siècles plus tôt, lors d'une tempête un peu folle, le bateau du pirate Henry Morgan, chargé d'or et de joyaux, s'est échoué sur la canopée. Pendant trois générations, les chasseurs de trésor vont se relayer,  toujours bredouilles, pendant que la propriété familiale des Otero prospère peu à peu, et que ce monde retiré, voué au sucre et au rhum, se transforme. D'autres trésors se révèlent : l'amour, la filiation, l’accomplissement par le travail...

Miguel Bonnefoy déroule un récit fantasque et bon enfant dont on ne sait trop s'il est un hommage aux chasseurs de trésors ou aux trésors eux-mêmes, ceux qui se dérobent et ceux qui se révèlent. Il manque à l'auteur un certain souffle pour que cela soit totalement poétique, généreux, luxuriant et que certaines scènes, qui auraient pu être  d'anthologie, déploient toute leur éclat. Cela reste une agréable lecture de divertissement, qui réjouit l'imagination.


mots-clés : #aventure #famille
par topocl
le Lun 25 Sep - 20:52
 
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Sujet: Miguel Bonnefoy
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William Kotzwinkle

Le nageur dans la mer secrète.

Tag famille sur Des Choses à lire - Page 11 Le-nag11


Diane et Laski habitent au fin  fond d'une forêt engloutie sous la neige. Le bébé s'annonce, et tout se passe bien : la voiture démarre, ne tombe pas dans le fossé. Le travail dure longtemps , mais le personnel soignant est gentil et compétent.
Et puis l'enfant est mort.

J'ai construit une maison pour nous, avec une chambre pour lui, et à présent je fabrique son cercueil. Le travail est le même. Il nous faut avancer, simplement, les yeux ouverts, en restant attentif à ce que nous faisons, sans laisser la place aux sentiments inutiles. Puis nous sommes emportés par la nuit.


C'est une longue nouvelle - ou un court roman - , touchante et pudique, s'attachant au détail, qui sonde l'intime sans remuer  les larmes, une lecture bouleversante de retenue.

mots-clés : #famille #mort
par topocl
le Sam 16 Sep - 14:07
 
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Sujet: William Kotzwinkle
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Mikhaïl Boulgakov

Comment ne pas me joindre aux éloges pour „Le maître et Marguerite » ? L’auteur utilise largement les moyens de la satire, si repandus dans la littérature soviétique (et russe). C’est à se demander si ce n’est pas un moyen par excellence de parler de choses qu’on ne peut pas nommer ouvertement ?! Mais je vais me concentrer à présenter un peu plus:

Tag famille sur Des Choses à lire - Page 11 00029010

La garde blanche


CONTENU :
C’est l’histoire fortement imprégnée par des traits autobiographiques de trois frères et sœurs (Alexandre, Hélène, Nikolka) en Décembre 1918. En Russie c’est la guerre civile et des restes de troupes allemandes et d’autres forces tiennent des larges parties de l’Ukraine. Kiev rassemble des gens venus de partout et de toutes les origines : des banquiers, des aristocrates, des gens douteux fuyant les forces bolchéviques.  Sous l’assaut des troupes nationalistes de Petlioura les Allemands et leurs alliés, comme le « Hetman », prennent la fuite. Jusqu’à l’arrivée de l’Armée Rouge en Février 1919 s’écouleront seulement deux mois. L’histoire « personnelle » des trois figures principales est imbriquée dans la « grande Histoire » : Hélène va être abandonné par son mari « collaborateur et faisant confiance dans les Allemands. Alexandre (sous certains égards l’Alter Ego de Boulgakov) se met à disposition en sa qualité de médecin et sera blessé. Nikolka va s’engager dans les combats tandis que Hélène attend avec crainte à la maison.

IMPRESSIONS :
Des grandes confusions et mélanges, des combats sans fins, des changements de front marquaient la situation de ces années dans le pays de la révolution d’Octobre. Et on pressent fortement que les changements en Russie n’étaient pas le résultat d’un seul jour, mais que les conflits s’allongeaient, se compliquaient pendant des longues périodes (et au-delà par d’autres formes de résistance et de combats). Et quelques fois il y en avait bien plus que deux partis en questions, ainsi en Ukraine ! Je suis reconnaissant entre autre que ce livre fait connaître un peu de cette complexité des années révolutionnaires. Cela reste presque impensable, quel chaos ce pays a traversé…

Il me semble que ce livre n’est pas de la même veine si fortement satirique que d’autres livres de Boulgakov, même si aussi ici on trouvera l’une ou l’autre situation grotesque. Au centre de ce livre si marqué par les événements historiques est quand même l’individu, la personne, ces trois frères et sœurs Tourbine (nom de la famille maternelle de Boulgakov !) et leurs amis proches.  C’est comme si pour le lecteur attentif on lit que l’individu n’est pas aboli. Au milieu de ces turbulences politiques ils continuent à chercher pour ce qu’on pourrait appeler un peu pathétiquement « le sens et la vraie vie ». Et en fait : au tout début paraît cette grande question universelle et typiquement russe à la fois : « Comment vivre ? » Cela me semble une vraie perspective de lire ce roman avec la question comment on peut bien survivre de tels temps de conflits et de désespoir. Qu’est-ce qui pourra nous sauver ? Ici c’est certainement le rôle de chacun, la contribution de chacun : ils prennent part actif à l’histoire…

mots-clés : #autobiographie #famille #historique #premiereguerre #revolution
par tom léo
le Mer 13 Sep - 21:56
 
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Sujet: Mikhaïl Boulgakov
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Geneviève Brisac

Un année avec mon père

De la mort de sa femme dans un accident de voiture (sa femme qu'il a en quelque sorte tuée) jusqu'à son propre décès,  Geneviève Brisac a vécu une bonne année proche de son père, dans un compagnonnage subtil. Auprès de cet homme vaillant mais fragile, exigent et secret, il fallait une bonne louche de délicatesse pour que l'exercice, sur la corde raide, reste léger et confortable.

Ni grands discours, ni déballage d'émotions, ce n'est pas le genre de la maison, tout passe  en fierté et non-dits. Il faut un œil et une oreille acérés pour détecter l'épaule qui tombe de fatigue, le rare mot tendre (« ma grande »), la paupière qui cligne d'exaspération, cachés derrière la crânerie et le brio revendiqué. Et une bonne dose de doigté et de patience pour faire accepter le coup de main, sans amputer sur un territoire et une liberté farouchement revendiqués. Quelques souvenirs émergent, quelques confidence, assez rares,  car nos parents, ces êtres parmi les plus proches de nous, restent aussi parmi les plus mystérieux.

Sous la désinvolture apparente du récit, sous la tendre ironie, Geneviève Brisac cache des sentiments qui la (nous) prennent à la gorge.


mots-clés : #autobiographie #famille #mort #vieillesse #viequotidienne
par topocl
le Mar 12 Sep - 15:21
 
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Sujet: Geneviève Brisac
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Ota Pavel

Comment j'ai rencontré les poissons

Tag famille sur Des Choses à lire - Page 11 416b5c10

Récit en partie autobiographique, puisque les personnages sont les membres de sa famille et les événements sont historiques. Il n'y a pourtant jamais la sensation que l'auteur veut parler de lui malgré la première personne du singulier utilisée pour narrer l'histoire, on ressent un détachement qui laisse penser à une fiction.
D'ailleurs l'histoire ne perd aucunement en valeur selon qu'on la considère comme une fiction ou une autobiographie.

Ota Pavel nous trace donc des événements marquants de sa jeunesse, des péripéties de sa famille avant pendant et après la seconde guerre mondiale. L'originalité réside dans la place de la pêche comme activité de découverte de la nature, de la vie et demeurant comme creuset de lien social puis de Résistance. Il est agréable de lire un Roman portant sur des drames utiliser un ton si détaché et si fluide, si "global". s'il existe un focus sur la famille toute la Bohème est décrite et la richesse des psychologies des personnages, des détails des paysages, des faits de chaque situation tend à nous faire connaître et nous immerger en République Tchèque. J'ai beaucoup pensé à Bozena Nemcova en lisant ce livre ainsi qu'à certains romans naturalistes américains.

Le style est beau, typiquement tchèque si je puis dire, avec une belle fluidité de phrases et un vocabulaire simple, une exigence d'une ponctuation harmonieuse. L'humour caustique est aussi omniprésent ce qui permet de gagner en légèreté au fur et à mesure que le ciel s'assombrit.
On a beaucoup parlé en France de la Résistance française, et pour cause, mais on parle peu de ce qu'ont vécu les Tchèques. Il est intéressant de le découvrir grâce à Bor, Lustig, Weil, Hrabal et Pavel entre autres.
Un livre à lire absolument.


mots-clés : #famille #regimeautoritaire
par Hanta
le Jeu 7 Sep - 9:03
 
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Sujet: Ota Pavel
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Kate Atkinson

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C'est pas la fin du monde

Des petites nouvelles façon thé corsé, un peu âcre mais réconfortant pour une galerie de personnages à la banalité attachante et à l'extraordinaire palpable. Une pointe de... réalisme magique ? sur une belle couche d'humour sur la tartine de vie assez pathétique qui constitue la trame de ces vies.

Destins mal barrés, accidents de la vie, solitudes familiales, en bref coups de mou ou gros coups de mou sur paysage de catalogues contemporains automobiles, télévisuels en guise de mantras du quotidien.

Ce quotidien et le familier de ce décor assez envahissant sont ce qui m'a fait penser à William Gibson, et pourquoi pas avec ces personnages "simples" pris dans un itinéraire bis chaotique de leur existence. Avec peut-être ce goût de ne pas les abandonner et de ne pas faire l'impasse sur le merveilleux bancal d'un monde qui dérape (surtout dans les premières nouvelles d'ailleurs, celles qui cataloguent des objets).

Il y a un goût de recette au fil des pages, mais efficace, j'ai trouvé la cuillère un peu chargée mais je pardonne volontiers (en moins dur et plus moderne ça m'a aussi rappelé des nouvelles comme celles de Buzzati).

Par contre on reparle de Gibson. cat

mots-clés : #contemporain #famille #humour #mort #nouvelle #psychologique
par animal
le Lun 4 Sep - 21:34
 
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Sujet: Kate Atkinson
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Joyce Carol Oates

Tag famille sur Des Choses à lire - Page 11 41papd10




"Krista a confiance en son papa. Elle sait qu'il n'a pas pu tuer Zoe Kruller. Pourtant, à Sparta, les rumeurs s'amplifient, la police s'en mêle, on parle de crime adultère. Krista aimerait comprendre pourquoi sa famille est ravagée par cette histoire sordide. Adolescente sacrifiée sur l'autel des erreurs paternelles, elle conçoit peu à peu un amour étrange et obsessionnel pour Aaron, le fils de Zoe..."

Voici dixit la quatrième de couverture, le résumé de ce  magnifique roman, sur l'éclatement de deux familles qui vivent dans la petite ville de Sparta. L'histoire se présente en plusieurs parties, avec tout le savoir-faire  et le talent de JC Oates :

- La première basée sur le vécu et le ressenti de Krista, la fille d'un des amants de Zoé, Edward Diehl...soupçonné de l'assassinat de Zoé.
- La deuxième basée sur la vie de Aaron, fils de Zoé, dont le père Delray Kruller, est lui aussi suspecté dans un premier temps.
- La troisième partie est basée sur la rencontre entre Krista et Aaron.

Zoé , la victime :

"Delray était un ivrogne, un drogué, qui mâle-traitait sa femme pour la faire marcher droit.
Pourquoi j'ai démissionné parce que j'ai besoin de changement voilà pourquoi.
Allez vous faire voir vous et vos regards en coin, je mérite un peu de bonheur ou du moins une chance de bonheur. Voilà pourquoi.
"Poursuite du bonheur" : c'est dans la constitution américaine !
"Tous les hommes naissent égaux" : ça inclut les femmes !
Je ne rajeunis pas, c'est un fait. Ca vaut pour nous tous.
Si je dois rester debout à sourire à des clients autant être serveuse de bar. Il y a les pourboires !
J'aurai ma chance un jour. Je le sais.
Je ne suis pas superstitieuse. Ni dévote. Mais je crois.
Il faut avoir foi dans son destin. Il ne faut pas douter."


Krista :

A la mort de grand-père Diehl, j'avais quatre ans et n'allais pas encore à l'école.
Quand papa n'était pas à son travail, il s'enfermait dans son atelier du sous-sol et nous entendions ses outils électriques gémir à travers le plancher ; pendant les jours, les semaines qui suivirent l'enterrement de grand-père, papa ne nous parla pas de lui, sinon pour dire évasivement que grand-père était "parti". A son expression, mon frère et moi avions compris qu'il ne fallait pas lui demander où.
Notre mère nous avait avertis : Ne posez pas de question à papa, il est triste.
Au téléphone maman disait Eddy est très affecté. Tu sais comment il est, il garde tout à l'intérieur.
Ces mots me frappèrent : garder tout à l'intérieur.
Très affecté. Tout à l'intérieur."


Aaron (ou Krull) c'est selon :

"Ce soir-là avec ses amis, à la gare de triage. Les soirs où il n'avait pas à travailler tard ou à partir avec la dépanneuse qui était un service fourni vingt-quatre heures sur vingt-quatre par le garage Kruller, il s'étais mis à traîner avec ces nouveaux amis qui étaient plus âgés que lui et admirables à ses yeux. Parce que Krull était mineur et pas eux. Ca allait tellement vite - on quittait le lycée une année et, quelques années plus tard, on avait vingt cinq ans ou plus. Comme Delray, ces types étaient prêts à tout essayer. Et des filles aussi. Krull avait un faible pour la bière mais il s'était aussi mis à aimer l'indifférence rêveuse que donnait le hasch. Ca ressemblait à la Novocaïne. Le bourdonnement s'assourdissait et on avait une sorte de vision floue en tunnel, les visages tournoyaient lentement, fondaient, c'était comique..

Zoé avait été une junkie, une héroïnomane. C'était ce qu'on disait d'elle après sa mort."



Magnifique roman. Et on n'est pas non plus déçu par la fin  Very Happy

mots-clés : #famille #polar
par simla
le Dim 3 Sep - 1:52
 
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Sujet: Joyce Carol Oates
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Geneviève Brisac

Une année avec mon père

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Un récit , ou plutôt des impressions qui demeurent ,d'une année de vie, d'un automne à un autre , après la mort de sa mère dans un accident, laissant leur père ,quelqu'un de très indépendant ,seul .

En exergue:
Dans toute parole donnée, dans toute parole reçue, dans chaque geste et la moindre pensée, dans tout fragment même bref et aléatoire, de notre vie et celle d’autrui, il y a quelque chose de précaire et quelque chose d’inéluctable, quelque chose de caduc et quelque chose d’indestructible.
Marisa Madieri

Malgré les deux morts qui marquent chaque automne- le père est mort en novembre, 14 mois après son épouse- ce n'est pas du tout un livre tragique. Mais tourmenté plutôt par le souci de , pour la narratrice, rester à sa place , veiller sans prendre en charge, il ne le permettrait pas de toutes façons, et c'est très difficile.

"Je déteste mon nouveau rôle. La vie privée de mon père ne m’intéresse pas, ne me regarde pas. D’ailleurs, il ne veut pas que nous nous en mêlions. Je voudrais en être dispensée. Etre loin, à l’autre bout du monde. Je le suis davantage pourtant que je ne le crois.
Le docteur Chaïm se moque de moi.
Vous vous accordez tellement d’importance!
Quelle injustice encore.
Que savez-vous de ce que pense votre père? De sa vie? De ses désirs, de ses principes, de ses peurs?
Presque rien, mais trop encore.
Et je ferme les yeux en versant l’eau du thé pour ne pas voir la rouille, les paquets de pâtes périmés, le calcaire, le vieux pain.
Vous regardez quand même.
Je ne veux pas verser l’eau à côté du pot.
J’essaie de faire des visites plus légères, des visites qui ne seraient plus des visites, des je-passais-juste-par là qui ne trompent personne, ni moi, mais je ne veux pas être l’infirmière, je ne suis pas la garde-malade, éloignez de moi la fille répressive, jamais je n’ai voulu priver mon père de quoi que ce soit, elles tournent autour de moi, ces figures hostiles, ô Cordelia, prête moi ton sourire! J’essaie de ne pas prendre trop d’habitudes filiales.
Je relis Le Roi Lear, Le Père Goriot,et le si beau David Golder pour me vacciner contre l’intimité si décriée des filles et de leurs pères. Je lis Anna Freud, Camille Claudel, Jenny Marx, Virginia Woolf. Les Antigones aux pieds englués dans les traces trop fraîches des semelles de leurs pères.
Je relis le Journal de Virginia Woolf. 1928.
«  Anniversaire de Père. Il aurait eu quatre-vingt-seize ans. Oui, quatre-vingt-seize ans aujourd’hui,comme d’autres personnes que l’on a connues. Mais, Dieu merci, il ne les a pas eus. Sa vie aurait absorbé toute la mienne. Je n’aurais rien écrit. Pas un seul livre. »
Ce n’est pas votre vie, dit le docteur Chaïm, grandissez donc un peu.
"


C'est une année pendant laquelle chacun recherche de nouvelles marques ,et leurs rapports sont:"un mélange de pudeur, d'admiration de frustration et de tendresse. Il y a tout ce qui ne se dit pas, les loupés ou les espoirs décus que l'on se camoufle parce qu'il est trop tard."

Une année traversée de beaucoup de chagrin, qui s'exprime très peu ,même entre soeurs:
"Je ne peux savoir ce que pensent mes sœurs. Un mur de chagrin nous sépare comme nous sépareraient des chutes d’eau. ( Je pense à une image d’Hitchcock, l’héroïne est cachée sous les chutes, un abri, une grotte impensée. La peine ressemble à cela.)"

Et de moments cocasses, dont du moins Geneviève Brisac, avec son humour, cherche à retranscrire la cocasserie.
Et aussi des moments joliment qualifiés d'apnées de l'optimisme..

Un ou deux règlements de compte, aussi faits avec finesse, mais quand même! Un extrait, j'aime assez la façon de raconter de Geneviève Brisac:

"J’ai invité les Butor, dit mon père. J’irai d’abord l’écouter à la Sorbonne, il reçoit une chose honorifique, il fait un discours, ils m’ont gentiment envoyé une invitation. Puis nous dînerons à la Closerie des Lilas. Voudrais-tu être des nôtres?

La soirée est belle et douce, je les trouve tous les trois en train de boire l’apéritif, Michel Butor a les joues roses, le ventre rond sous l’empiètement de sa cotte grise, une salopette du soir, il sourit aux anges, il évoque les hommages qui lui ont été rendus aujourd’hui. Elle en profite pour rappeler quelques réjouissances récentes, des colloques en l’honneur de ce même Butor, qui est son époux depuis plus de cinquante ans, peut être cinquante-cinq, cet heureux temps, ce temps si ancien, une exposition que nous ne devrions manquer sous aucun prétexte. Ils ont l’air heureux.
Vous ne pouvez pas imaginer le nombre d’universités qui réclament Michel partout dans le monde. Et nous adorons voyager.
Nous partons vers la Closerie des Lilas. Mon père a l'air épuisé, il est pâle. Il vacille sur sa canne...
L'Inde nous a éblouis, raconte Butor, une civilisation étonnante, des civilisations plutôt, des mythes passionnants, le Gange, les temples, les crémations, sans parler des singes qui nous volaient nos affaires ...
Si on commandait le dîner? propose mon père dont je crains qu'il ne défaille d'ennui.
Je crains aussi que les Butor ne sortent des photos, mais ils ont changé de sujet, et, en mangeant d'excellent appétit, ils évoquent les joies que leur donnent leurs enfants, les étés dans le Sud-Ouest avec leurs petits-enfants, les travaux dans la maison.
Ils resplendissent.
Ils ne posent aucune question.
Ils sont à leur affaire.
Mon père est maintenant jaune citron. Il paie le dîner, attrape sa veste, se prend les pieds dans les lanières de son sac, au revoir, au revoir, et nous marchons dans la nuit, clopin-clopant.
Quelles âmes desséchées, dis-je, quelle aura de vanité efficace, comme on dit la grâce efficace.
Ta mère avait raison, murmure mon père, la littérature durcit le coeur, les écrivains sont des monstres d'indifférence.C'est ce qu'elle disait toujours.
Il y a des boulangers d'une cruauté extrême, dis-je, et des fleuristes nazis.
Mon père trébuche une fois encore, l'alcool, la fatigue, le chagrin, nous sommes devant sa porte, je pianote pour l'ouvrir.
Michel Butor était son meilleur ami, et il n'a même pas prononcé son prénom, murmure-t-il.
Par pudeur, peut être, dis-je.
Mais j'ai des doutes.
"

Beaucoup aimé, vraiment.




mots-clés : #autobiographie #famille #mort #vieillesse #viequotidienne
par Marie
le Mer 30 Aoû - 14:22
 
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Sujet: Geneviève Brisac
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Thomas McGuane

À la cadence de l'herbe

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@ Billiethefall : ce livre passionnera les amateurs de chevaux et de Grand Ouest, mais pas que…

C’est la saga d'une famille : Sunny Jim Whitelaw, propriétaire d’une usine, le patriarche qui a toujours tenu les siens d'une main de fer et qui, venant de mourir, a trouvé le moyen de les maintenir sous sa coupe après sa mort ; Alice, sa femme, qu’il a écrasée comme leurs deux filles, Evelyn et Natalie, ainsi que les deux beaux-fils : Paul, le prédateur plein de charme en qui Jim a reconnu un congénère sans en être dupe, et le modeste, gentil Stuart, perpétuellement brimé tant par son beau-père et employeur que par sa femme Natalie, artificielle et instable, aussi amante de Paul. Et Bill Champion, taiseux cow-boy d'un autre âge, qui s’échine sur un ranch non loin (et presque aussi peu rentable que l’usine, le tout appartenant à un monde condamné), et qui excelle avec chevaux et bovins. Evelyn y passe beaucoup de temps, et le vieux Bill, plus proche de la famille qu’on le croirait, compose avec elle le cœur du roman, en contrepoint du défunt omniprésent et de l’ambitieux Paul.
Le nœud de l'imbroglio, c’est le testament qui lie la disposition de l’héritage ‒ l’affaire familiale, dont la direction est remise à Paul ‒ à la vie en couple de ce dernier avec Evelyn, qui a divorcé dans un effort d’échapper à sa funeste fascination.
La narration de l’intrigue, juxtaposition calculée de séquences sans grand respect de la durée ou du déroulement chronologique des événements, fait monter crescendo l’intérêt du lecteur, d’un aspect, d’une révélation à l’autre (telle la stupéfiante péripétie de la transplantation de rein).
Mais c’est aussi l’observation incisive du monde âpre de ces Américains des grandes plaines sous les contreforts du Montana, laminés par l’évolution économique.
Irrésistibles épisodes du bar avec son chanteur à la manque, du drag queen champêtre bloqué par la neige avec ses parents et s’apprêtant à incinérer le grand-père…

Evelyn au bar :
« Elle regarda son jeune cavalier et se demanda s’il savait déjà qu’aucun remède contre la solitude ne marche, que c’était une sorte de maladie chronique et que tout ce qu’on utilisait comme produit anesthésique se retournait contre vous. »


Jim et Paul :
« Ils avaient en commun une absence totale de sens de l’humour et la conviction que les masses étaient handicapées par leur besoin de ne voir que ce qu’elles voulaient voir. »


Jim :
« Les gens sourient pour inciter les autres à tomber d’accord avec eux. C’est minable. S’ils avaient le moindre cran ou un peu d’autorité, ils s’en ficheraient. »


Bill :
« …] sentir inexorablement qu’il marchait à contretemps, et qu’il vivait dans un pays trop content de le voir se tuer à un métier qui n’existait sans doute déjà plus. »


Stuart préparant son divorce :
« ‒ Je voulais avoir un bébé mais toi tu te demandais quel ait tu aurais en maillot de bain. À la limite, ça pourrait se comprendre, mais tu ne voulais jamais aller nager. Natalie, quand je me serai débarrassé de toi, je vais adopter toute une portée de petits Bulgares, là-bas on te laisse en prendre autant que tu en veux, et je vais les élever et leur payer des études avec ton argent. »


Alice :
« Votre père avait une santé fragile. Il ne faisait pas de sport, et il avait mangé toute sa vie ces énormes steaks persillés de Kansas City. Il m’a avoué un jour avoir mangé plus de bœufs que n’en montre la grande scène de la ruée des bêtes dans La Rivière rouge de John Waine, mais il savait qu’il avait atteint l’âge où il ne pourrait pas dévorer un second troupeau de cette taille. C’était sa façon à lui de se sentir mortel. »

L'intrigue de ce roman rappelle celles de Jim Harrison, ami de l’auteur, et même certaines de Faulkner. Une lecture qui plaira(it) à beaucoup !
Le superbe titre condense le tempo sans précipitation de la nature, et du temps qui s’en va.


mots-clés : #famille #nature
par Tristram
le Ven 25 Aoû - 21:35
 
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Sujet: Thomas McGuane
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Carlos Heitor Cony


Tag famille sur Des Choses à lire - Page 11 Quasi110

Quasi mémoires quasi roman. - Gallimard

Lorsque le journaliste Carlos Heitor Cony  reçoit à l'hotel Novo Mundo une
enveloppe à son nom, il l'identifie immédiatement comme venant de son père, mort dix ans plus tot.
Même écriture, même odeur, même manière.

Chaque jour, Carlos Heitor examine l' enveloppe, mais il ne l'ouvre pas.
Par contre les souvenirs du père affluent, et nous plongent dans le Rio des années 30.
Mais pas seulement, le père étant un voyageur actif et plus encore un voyageur immobile effervescent.
Au fil de son imagination débordante, il se lance dans les entreprises les plus folles et qui se terminent plutôt mal dans l'ensemble.
Mais il continue avec constance et ingénuité. Et avec même une certaine élégance.

Bien entendu, il ne pouvait se contenter d' une vie paisible et rangée au sein de sa famille et du journal où il s'exprimait.
Et donc, toute son existence, il inventa d' autres vies à son usage exclusif.
Il se chargeait de les améliorer et meme au fil du temps de les réinventer.
Tel ce voyage en Italie qui tourna court,  mais qu'il ne cessait de raconter, finissant par croire l'avoir rééllement fait.
Mieux, il finissait toujours par entrainer les autres dans ses aventures grâce à son enthousiasme et ses dons de conteur.
Mythomane lui ? Magicien plutôt.
Certes, il compliquait la vie de ses amis et de ses proches.
Il les mettait dans l' embarras, et parfois dans des situations précaires, voire carrément dangereuses.

Mais comment lui en vouloir ?
Sa femme savait qu'il la trompait et qu'il avait une double vie.
Une autre maison ailleurs, une autre femme.
Mais il aimait tout autant sa femme et ses enfants, simplement il ne pouvait s'acccomoder uniquement de ce qu'il avait.
Alors sa femme lui pardonnait en le considérant comme un enfant pas abouti.

Quant à son narrateur de fils, il gardait le souvenir émerveillé d'un père inventif qui le faisait lever à l'aube pour piqueniquer et voir le soleil
apparaitre sur la montagne.
Où qui fabriquait des ballons dirigeables en papier si beaux à voir, mais qui  risquaient de provoquer des incendies.
Il le savait le père.
Et il pouvait condamner le projet de bonne foi et le reprendre avec la même bonne foi.
Croyant sincèrement ceci et son contraire.

En fin de compte, ce père extravagant est pour ses fils inoubliable et meme quasiment éternel.
Et ce livre, un hommage ému.
D'ailleurs jamais le narrateur n'aura la tentation d'ouvrir l'enveloppe, persuadé qu'il est, que le père saura se manifester encore.
A le lire, on y croit aussi.


mots-clés : #famille
par bix_229
le Lun 21 Aoû - 19:45
 
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Sujet: Carlos Heitor Cony
Réponses: 1
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Ken Kesey

Tag famille sur Des Choses à lire - Page 11 Captur29


Et quelquefois j'ai comme une grande idée...


S'entortillant puis, après un temps d'arrêt, se détortillant dans les bourrasques de pluie, à deux ou trois mètres au-dessus du flot rapide, un bras humain, attaché par le poignet (rien que le bras, qui tourne, là au-dessus de l'eau)... spectacle à l'intention des chiens sur la rive, de cette satanée pluie, de la fumée, de la maison, des arbres et de la foule qui crie, excédée, depuis l'autre côté de la rivière : "Stammmper ! Va pourrir en enfer, Hank Stammmmper !"
Et à l'intention de tous ceux qui auraient envie de regarder.
...celui qui s'est démené pour que le bras vienne osciller bien en vue depuis la route a aussi pris la peine de replier tous les doigts avant de les attacher, tous sauf le majeur, de sorte que cette provocation à la raideur universelle demeure, dressée dans son mépris, bien reconnaissable par n'importe qui..


Nous sommes dans l’Oregon et ce bras moqueur qui fait enrager la foule sur l’autre rive de la rivière Wakanga  est aussi indépendant que la famille Stamper. Cette grande famille de bûcherons depuis des décennies, installée dans ce village.

Henry Stamper le patriarche, implacable même à 80 ans
Hank son fils, (son père avait accroché à sa naissance sa règle de vie écrite : « ne lâche rien de rien)sa femme Vivian,
Joe Ben le cousin (un sympathique et utopique gnome) avec sa famille vivent tous dans la « vieille maison Stamper » renommée par sa position au-dessus de la rivière. Elle s’accroche au flan de la montagne, soutenue par un étaiement hétéroclite et anarchique, ne cédant rien à l’appétit de la rivière.


Le village est en effervescence : les ouvriers de la Cie WP sont en grève illimitée afin d’obtenir satisfaction de leur revendication ; la durée de ce conflit social a mis leur économie en grande difficulté aussi ils voient avec colère que Hank (qui dirige l’entreprise familiale) continue avec son équipe à travailler dur.
Hank est à la fois admiré et envié mais à ce moment là c’est l’envie et la colère qui dominent. Ce dernier craint de ne pouvoir assumer le contrat qui le lie à la WP, aussi sur les conseils de Joe il accepte de demander à son demi-frère Leland (Lee) (introverti)qui a quitté la maison avec sa mère depuis une douzaine d’années, de revenir pour les aider, car c’est lui aussi un Stamper.

Dernière entrevue entre les deux frères  alors que Lee est un gamin d’une dizaine d’années :

Lee :
...attends un peu le jour où...
...attends voir le jour où je serais assez grand pour...


Sur la carte invitant Lee à rejoindre la famille Hank a inscrit en gras au bas :
Tu dois être assez grand maintenant frérot !


Oui il est assez grand maintenant le frérot, mais il est toujours sous l’ « ombre » du grand frère, celui qui réussit tout, celui qui lui a volé sa vie, celui qui est responsable de ses échecs.

Au village la situation s’envenime quand le syndicat des ouvriers apprend le contrat qui lie Hank à la WP et qui constitue de fait une entrave à leur grève. Les ouvriers doivent empêcher Hank d’ honorer son contrat.

Les coups dans le dos de la vie, de la Nature  toucheront si profondément Hank qu’il laisse tomber, il accepte la proposition qui lui est faite par le syndicat ; il est las de lutter,  Cependant sa chute sera si hypocritement et ironiquement saluée par les ouvriers, par la ville entière qu’il en tirera une grande force générée par sa grande faiblesse, parce que Hank a pris conscience que la force n’existe pas elle  n’est rien d’ autre qu’un degré de faiblesse.

Lee lui ne veut plus rester encore 12 ans sous l’ombre de son frère, si grande fut-elle. Le petit compagnon dans sa tête qui l’accompagne depuis toutes ces années ne sera pas écouté.



Cette saga familiale est portée par une écriture à la fois réaliste et poétique. Les descriptions de la Nature permettent une véritable imprégnation dans l’ atmosphère de la région. La rivière Wakanga est un élément et un lien essentiel à la vie de la région.
Tous les personnages sont psychologiquement bien étudiés.

C’est une excellente lecture qui reflète, je pense, la dure vie dans cette région car pour la connaître il faut « avoir passé un hiver » . Certains n’ont pas pu, pas su passer l’hiver.
C'est surtout une plongée dans les méandres des relations humaines.


Extraits

Y a peut-être des pères qui causent avec leur fils comme ça, mais le vieux Henry et moi, c'était pas notre genre. Il a fait autrement. Il m' a couché ça par écrit et il l'a accroché au mur de ma chambre. Le jour même de ma naissance, à ce qu'on m' a dit. Tout ça il m'a fallu un bon bout de temps avant de le comprendre. Seize ans. Et là encore c'est pas le paternel qui me l'a expliqué ; c'est sa femme, ma belle-mère.
la rivière, un personnage : la voir comme elle est, c'est déjà bien assez. Et la meilleure façon de la voir c'est pas de regarder derrière elle - ni en-deça ni au-delà - mais de la regarder en face. Et ne jamais oublier que ce qu'elle veut c'est tirer un bon profit.

"et ne pas être assez grand pour prendre sa place 'a privé de ma propre place, m' a laissé n'être plus personne. Moi, je voulais être quelqu'un, Viv, et il n'y avait apparemment qu'une seule façon d'y arriver...

Lee pense :  Hank oublie les paroles cachées derrière mes paroles, reste encore, continue de parler. C'est notre chance. C'est ma chance. Continue de parler assez pour confirmer l'amour ou la haine, assez pour que je sois sûr de l'un ou de l'autre. S'il te plait reste encore, reste encore...

Ce qui voulait dire reconquérir la fierté que j’avais troquée contre la pitié.
Ce qui voulait dire ne pas laisser ce salopard descendre cette putain de rivière sans moi, pas une fois de plus, pas cette fois-ci, même si nous devions nous noyer tous les deux.



mots-clés : #famille #social #psychologique
par Bédoulène
le Lun 21 Aoû - 13:52
 
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Sujet: Ken Kesey
Réponses: 15
Vues: 1390

Kenzaburō ŌE

Une existence tranquille

Tag famille sur Des Choses à lire - Page 11 Images36

J'ai du mal avec les romans japonais. Mais régulièrement, je re-tente. C'est pourquoi j'ai pris Une existence tranquille,

Et bien,  c'est tout à fait un roman japonais ! C'est à dire  qu'il y a plein de choses intéressantes, mais que je m'y sens un peu à distance, j'y vois un coté figé voire compassé même si pour une fois, les émotions sont extrêmement intenses et à fleur de peau.

Ce livre est un récit en ce  sens qu'il décrit une tranche de vie. Il est très astucieux parce qu'on peut y voir l'autoportrait sans concession de l'auteur, (qui, c'est le moins qu'on puisse dire ne se ménage pas), alors que justement il est le grand absent du livre. En effet il a pris une année sabbatique aux États-Unis, emmenant sa femme et «abandonnant » ses trois enfants jeunes adultes, attitude qui est critiquée par la plupart des protagonistes du livre. Il se décrit  donc alors qu'il n'est pas là, et en même temps, décrit sa famille alors même qu'elle est éclatée, qu'il l'a en quelque sorte reniée. On sent quand même à travers les lignes l'immense amour qu'il voue à chacun et à cette bizarre construction à cinq qu'ils sont arrivés à élaborer, et ce, en dépit de ses caprices de grand homme.

C'est surtout le portrait de Mâ, la fille cadette, une jeune fille naïve, réservée, consciencieuse. C'est elle qui a la charge de ses deux frères, de son aîné handicapé mental léger, souvent déconcertant, joyeux et attentif, compositeur prodige, et de Ô le plus jeune, pragmatique, qui se consacre à ses études. Là, ça se discute pas, c'est le rôle des femmes de s'occuper des hommes : l'épouse suit son mari, la fille s'occupe de ses frères. Ce qui est plus satisfaisant, c'est la relation douce et passionnelle entre Mâ et  son frère handicapé, chacun, bien sûr, enrichissant l'autre.

Le récit est un enchaînement de petits faits quotidiens, de description de personnes, de jours qui passent avec leurs joie et leur peurs, d'événements heureux et malheureux. Mais on y trouve aussi des échanges  intellectuels, une quête de soi, tout cela souvent assez cérébral et cet aspect m'a rebutée. D'autant plus qu'il s'appuie sur l'analyse d’œuvres culturelles que je ne connais pas (William Blake, Céline qui curieusement fascine Mâ par sa tendresse, Stalker de Tarkovski). J'ai beaucoup aimé, face aux élucubrations existentielles du père, l'attitude du vieux couple qui protège les enfants, mi-fou mi-sage, qui, au lieu de se torturer le ciboulot, met en actes ses choix de vie, et tout particulièrement de Mme Shigetô et sa théorie des « personnes de rien du tout ».

Mon sentiment, c'est que je suis née comme une personne de rien du tout, que je vis en conséquence, que je vivrai encore ainsi un certain temps, et puis que je mourrai comme une personne de rien du tout.(...).
Ce que je pense, avec ma tête absolument ordinaire, c'est que tant que je vivrai comme une personne de rien du tout, en veillant à ne m'accorder aucun privilège même le plus insignifiant, je garderai une marge de manœuvre. À partir de là, il suffit qu'à ma façon, je m'efforce de faire pour le mieux. Même si pour moi, « faire pour le mieux », ça n'est rien de plus que prêter une écharpe à une fille fatiguée qui avait froid, comme M. Shigetô a eu la gentillesse de s'en souvenir.
Mais malgré tout, j'ai l'impression que si l'on s'en tient à cette résolution de vivre comme une personne de rien, et bien au moment de mourir on doit pouvoir paisiblement revenir à zéro. Puisqu'il ne s'agit que de passer de presque zéro à zéro.


Comme quoi, même un livre qui ne vous accroche pas trop, c'est bien intéressant !

(commentaire récupéré)


mots-clés : #famille #pathologie #traditions
par topocl
le Ven 18 Aoû - 13:46
 
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Sujet: Kenzaburō ŌE
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Christos Tsiolkas

Jesus Man

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Roman choc s'il en est qui décrit les péripéties et drame d'une famille grecque en Australie. Ce récit est d'ailleurs un prétexte pour dresser un portrait au vitriol et une description sans concession de la société australienne. Emploi, racisme, chômage, sexe, moeurs, multiculturalisme non assumé, perte d'identité sont autant de thèmes que l'on pourrait transposer sans peine en France. Il est d'ailleurs intéressant de les voir traités pour analyser un autre pays et à la façon de Tsiolkas. Dialogues tranchants, avis tranchés, scènes sexuelles dérangeantes, rapports familiaux poignants et choquants ce roman suinte d'angoisse et de désespoir. On peut penser à du Larry Clark romancé, ou à du Irvin Welsh. C'est dans un style brut avec la volonté de nous planter dans les yeux un décor qu'on ne veut pas voir au quotidien, avec une vulgarité non feinte mais subtile que l'on se prend à réfléchir sur notre propre identité et nos propres pulsions, nos préjugés mais aussi nos attachements et nos réflexions. Un roman utile et vif.


mots-clés : #famille #immigration #social
par Hanta
le Ven 18 Aoû - 10:29
 
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Sujet: Christos Tsiolkas
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François Mauriac

Génitrix


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Certes François Mauriac n'appartient à cette race d'audacieux qui feront avancer la littérature sur de nouveaux sentiers , il est catho aussi et se positionne en tant que tel dans son écriture et tout cela n'est pas très vendeur ....Je me souviens de la bouille condescendante de mon ancien libraire lorsque je souhaitais savoir s'il était entré en Pléiade ...Mais moi j'aime Mauriac , et je le tiens en haute estime .
Lire Mauriac , c'est accepter de se glisser dans une prose sans surprise , finement travaillée mais sans ces coups d'éclats inattendus qui portent le lecteur dans un ravissement ponctuel , influençant quelquefois avec quelques facilités l'adhésion du lecteur ...Non , Mauriac , c'est le souci de vérité , c'est le travail bien fait d'un écrivain scrupuleux , probablement viscéral mais canalisant par une volonté de "rendre juste " .
Force est de constater ,après avoir lu plusieurs de ces oeuvres majeures, qu'il n'élargit guère son champ d'observation et d'analyse . Scrupuleusement attaché à ses racines terriennes , formaté par une éducation catholique et un milieu bourgeois provincial , son univers littéraire restera confiné dans un microcosme dont il semble tirer une palette pourtant infinie de couleurs .
Génitrix donc ?
A haute voix , ça claque , sans appel , toute violence déversée dans l'instant , aucune échappatoire possible et déjà Vipère au poing apparait en effet de résonnance !
Alors oui , Mauriac nous décrit la lente descente aux abîmes d'un fils et sa mère ,victimes de leur incapacité à couper leur lien hautement toxique :prisonniers de leur système relationnel construit sur un amour puissant et pervers , addictif , destructeur , alimentant leur déchéance respective .... Félicité , la mal-nommé, incapable de respirer sans la présence physique de son fils à ses côtés , Fernand son bien-aimé incapable de jouir de la vie , mais aussi des femmes sans une relation conflictuelle et perverse , deux âmes tricotées l'une dans l'autre , se suffisant à eux-mêmes dans leur auto-destruction , incapable de s'abstraire de ce fonctionnement puisque faisant partis de leur identité presque .
Si Fernand tentera de s'émanciper par un mariage raté , ce ne sera que pour revenir plus violemment encore dans le giron de sa mère . Ses incartades ponctuelles "à la ville" pour assouvir quelques besoins besoins primaires avec "son habitude", le ramène aussi rapidement vers son poison , sa source vive ," la queue entre les jambes ", plus dépendant et morveux que jamais .
La mort de la Génitrix , loin d'apaiser enfin le fils , ne fera qu'attiser cet "amour" démoniaque et plus que jamais enfermé dans les griffes du diable , il basculera dans une sorte de schizophrénie , incarnant la personnalité de la défunte .
Nous sommes dans la campagne Bordelaise , dans une immense propriété (qui n'est pas sans rappeler celle de Mauriac , Malagar ),et on sent le poids des traditions séculaires , l'inscription de la généalogie dans la terre brûlante sous le soleil du Sud-Ouest .
Et c'est aussi dans cette appartenance familiale et terrienne et sociale qu'il faut appréhender l'écriture et les thèmes un peu obsessionnels de l'écrivain .
Dans Génitrix par exemple , gravitent autour du couple Mère/fils quelques personnages clés pour saisir la réalité sociale : Marie de Lados , la bonne et dévouée servante qui jouera un rôle majeur dans l'histoire de ses maitres .
Et c'est probablement là un des piliers de soubassement de l'oeuvre de Mauriac que cette capacité à éviter toute forme de binarité et de manichéisme primaire : personnages et lieux ont une importance essentielle pour mener son histoire en soulignant leur place , leur impact dans l'identité autant individuelle que collective :rien n'est schématisé , démonstratif et basique : Mauriac affine ses personnages , ses perceptions et flirterait presque avec une analyse psychanalytique .
En ce sens Génitrix me parait incontournable pour qui souhaiterait découvrir Mauriac tant il me parait le plus représentatif de toutes ces particularités .


mots-clés : #famille
par églantine
le Mar 15 Aoû - 10:07
 
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Sujet: François Mauriac
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Philippe Besson

Philippe Besson, pour moi, au fil des années, ça a été la douche écossaise. J'avais plutôt aimé la tentation de Thomas Spencer, et après j'avais adoré

Son frère

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Philippe Besson, je n’avais jamais rien lu de lui. Je le mettais une peu dans la case Marc Levy, peut-être la case juste avant. J’ai bien aimé la couverture de son dernier livre, Retour parmi les hommes (qui m’évoque Henry Fonda dans les Raisins de la Colère)
Spoiler:

Donc je me suis dit que c’était l’occasion de me faire mon opinion personnelle. Evidemment à la bibliothèque il est sur liste d’attente. Je me suis donc rabattue sur Son Frère
Son frère est un « Petit Roman Parfait »

Thomas et Lucas Andrieu sont nés à 15 mois d’écart. Ensemble ils ont joué sur les plages de l’île de Ré, vers la maison familiale. Une enfance ordinaire et heureuse. On les prenait pour des jumeaux. Vers 15 ans, Thomas s’est mis à aimer les filles et pour Lucas, c’était les garçons. Ce fut leur première différence, elle les a plutôt rapprochés. A 25 ans une deuxième différence les a définitivement soudés : Thomas a appris qu’il était malade, il a su qu’il allait mourir. ils ne se sont plus quittés. Ils ont partagé les derniers mois dans une fusion totale, par delà les mots. Ils sont retournés sur leur île, ils ont affronté la douleur , l’espoir vaincu, les proches qui s’éloigne , la dérisoire solitude face à la toute puissance scientifique.
Sur ce thème très dangereux, Besson a produit un texte d’une grande beauté, absolument pas tire-larme, en même temps complètement, désespéré et lumineux. Il n’y a pas un mot de trop, tout est indispensable et magnifique, on a souvent envie de relire des pages à peine les a t’on finies. Il y a un grand respect de l’homme, de la force et de la fragilité, et une infinie dignité dans ce texte.
C’est extrêmement distancié et en même temps l’émotion qui vous envahit. Il a un style tout en redondances, en répétitions qui marquent l’obsession de la douleur.
Un livre qui se lit en une soirée (impossible de remettre la fin – pourtant connue - à demain) et à garder au cœur toute une vie. Je vais sûrement lire d’autres Philippe Besson, lui enlever l’étiquette stupide que je lui avais collée, et même s’ils me déçoivent , il restera l’homme qui a écrit Son frère.

J’ai vu que Chéreau en a tiré un film, mais cela me fait plutôt peur. Chéreau n’est pas quelqu’un qui travaille dans la subtilité…


« Alors que la pluie continue de tomber sur l’île, sur la mer, sur St Clément, sur la maison silencieuse, il prend soudain la parole pour dire qu’il veut une tombe, quelque chose qui relie à la terre, qui ramène à elle. Bien sûr, lorsqu’on meurt sur une île, on envisage que le corps soit brûlé et les cendres jetées à la mer. Mais non, il insiste : il veut une sépulture, un lieu identifié, un socle sur lequel on se recueillera. Il dit qu’il veut du marbre, comme une trace qu’on laisse, un héritage qu’on lègue, un lien avec ce qui fut pour ceux qui restent. Il dit que, sous le nom il faudra apposer la date de naissance et celle de la mort, des jours comme des repères. Il ne faut pas perdre la mémoire de ça. Il dit qu’il n’a pas de rêve illusoire de grandeur et de postérité, simplement la conviction que le souvenir s’exprime dans ces poses silencieuses qu’on prend devant les pierres tombales, dans ces recueillements distraits ou émus au pied des dépouilles. Il dit qu’il veut voisiner avec ceux qui sont morts avant lui, les jeunes hommes fauchés dans le plus bel âge sur les champs de bataille et dont il regarde le visage d’enfant sur des cartes postales en noir et blanc, les veuves octogénaires qui ont promené leurs silhouettes de deuil pendant d ‘interminables années, les corps que la maladie a emportés, qu ‘un accident a mutilés. Il dit que c’est l’histoire d’un pays, d’un siècle qui se raconte dans les cimetières de France, qu’il souhaite être de cette histoire, que l’éparpillement des cendres au large de côtes qu’on a aimées, ça ne peut pas remplacer cela.(…) Il dit qu’il veut des fleurs, des couronnes, ce décorum un peu vulgaire, un deuil éclatant, celui qu’on montre, qu’on expose, afin de ne pas le conserver par-devers soi, afin de l’expulser, de l’accomplir véritablement. Il dit qu’il faudra des larmes, des évanouissements peut-être, des manifestations spectaculaires, que la souffrance s’exprime plutôt que d’être contenue. Il dit que ce sera une belle cérémonie : il compte sur moi. »


(commentaire récupéré)
mots-clés : #famille #identitesexuelle #pathologie
par topocl
le Ven 11 Aoû - 17:06
 
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Sujet: Philippe Besson
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Kate Atkinson

L'homme est un dieu en ruine

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Elle lui reprocha de n'avoir « aucun sens de l'aventure » ; il trouvait que la guerre lui avait offert assez d' « aventure » pour plusieurs vies et qu'un homme pouvait se nourrir tout aussi bien dans son propre jardin.


Teddy est un petit garçon charmant, tout le monde l'aime, ses parents et ses sœurs l'adorent. Teddy est un jeune homme qui aime la Nature, les chiens et la littérature, qui déteste les rails sur lesquels l'ont placé son travail dans la banque de son père. Il  voit dans la guerre, outre une façon de défendre de vrais valeurs, une espèce d'aventure salvatrice: en matière d'aiguillage qui change la donne, il n'a pas lésiné..

La guerre lui avait fait accepter la mort et puis, tout à coup, elle s'était terminée, et il y eut un lendemain et un autre lendemain et encore un lendemain. Il ne réussit jamais complètement à accepter l'idée qu'il avait un avenir.

Aux commandes de son avion, bombardant Berlin ou Hambourg, menacé par la défense allemande, drogué à l'adrénaline, il promet, s'il s'en sort, "d'être toujours gentil, de mener une existence honorable et paisible" (mais toujours avec des chiens, des livres et pas loin de la nature). Il ne va quand même pas embêter tout le monde sous prétexte qu'il a fait la guerre.

Il épouse donc Nancy, son "amoureuse d'enfance" et avance dans la vie d'une façon qui peut paraître terne ( son "train-train" dit Nancy). Comme en bon anglais stoïque, il préfère exprimer sa sensibilité et ses émotions par des actes plutôt que par des épanchements, il devient aussi un homme bon, ouvert, qui affronte courageusement les épreuves que lui a préparées la vie (et il n'en manque pas, celle-ci est loin d'avoir épuisé son stock pendant la guerre). Il a une fille et des petits-enfants, qui ne sont pas forcément ceux qu'il aurait aimé avoir (mais parfois, si), mais avec lesquels il se comporte avec droiture et générosité : il donne plutôt que recevoir (ce qui veut dire qu'il reçoit beaucoup, au final, évidemment : "On récolte ce qu'on sème"). Il ne sait pas si c'est le bonheur, mais c'est le chemin, le sien.

Voilà : c’est donc l'histoire d'un homme , d'une famille à travers un siècle intraitable. Mais moins nunuche que mon commentaire n'en donne l'impression, car c’est raconté par Kate Atkinson, qui manie l'humour avec autant de causticité que de tendresse, jongle avec les époques et les perspectives (les jeunes gens imaginent leur avenir et les vieux rameutent leurs souvenirs), qui aime ses personnages dans tous leurs défauts , leurs grandeurs et petitesses, et veut les partager : parce qu'il sont des pions ballottés par le destin et se défendent comme ils peuvent (ou ne peuvent pas). Kate Atkinson est enjouée, attentive; elle maîtrise subtilement les parenthèses et les remarques mordantes pour maîtriser l’émotion et dire le vrai.

Dans une belle alternance, les parties décrivant l'aviation en guerre sont aussi réussies que celles sur  la famille (ascendants et descendants) en recherche d'une certaine paix. Tout s'imbrique, tout se tient.
C'est très brillant et intelligent, pétillant je dirais,  plein de générosité comme de lucidité et de  vacheries, drôle, triste, c'est la vie, quoi. J'aurais bien aimé le connaître, Teddy.

C'est aussi dans une pirouette finale, et dans de nombreuses allusions au cours du livre, un hommage à la fiction, qui est une façon de s'en sortir, toujours.


mots-clés : #famille
par topocl
le Sam 5 Aoû - 15:51
 
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Sujet: Kate Atkinson
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Hisham Matar

Au pays des hommes

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En un temps de sang et de larmes, dans une Libye pleine d'hommes couverts d'hématomes et maculés d'urine, taraudée par le manque et désireuse de se libérer, j'étais cet enfant ridicule en quête de sollicitude, et même si je n'y songeais pas en ces termes à l'époque, l'auto-apitoiement avait viré à la détestation de soi.



Souleyman raconte l'été de ses 9 ans, un été libyen brûlant où la dictature de Kadaffi torture, assassine, paralyse, s'infiltre tant et si bien que les enfants la pressentent alors même que tout leur est caché. Ils ne savent à quel saint se vouer, la mère  mariée à 14 ans pour cause de dévergondage, le père dissident, perpétuel absent privilégiant ses idées sur sa famille, la Guide Suprême enseigné à l'école : au milieu cet enfant est décontenancé, dévasté,  tiraillé, ballotté de secret en tromperie...
Histoire d'une enfance  des plus douloureuses, Au pays des hommes montre comment celle-ci, entre fidélité et trahison, est volée, pervertie, manipulée, chassée.



mots-clés : #famille #initiatique #regimeautoritaire
par topocl
le Lun 31 Juil - 20:32
 
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Sujet: Hisham Matar
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István Örkény

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LE CHAT ET LA SOURIS. - Cambourakis

Sur la photo, elles ont seize ou dix sept ans les sœurs Szkalla, en robe vaporeuse de tulle.
Un demi siècle a passé et la photo,  déjà surexposée au départ -en 1918 ou 1919- a jauni au point que leurs visages sont à peine discernables.

Elles aussi ont vieilli les deux sœurs. Mais elles sont toujours en relation suivie au téléphone
ou par courrier.
Erzsi, Mme Orban est veuve est elle vit à la ville, et -contre son gré- dans un appartement communautaire. Ce qui laisse à penser que le régime communiste continue à sévir.
Giza, sa sœur, vit en Autriche, avec sa fille, son gendre et leurs deux enfants.
Erzsi est ingambe et c'est son avantage principal sur sa sœur, clouée sur un fauteuil d'infirme.
L'avantage de Giza est douteux, mais elle vit à Garmisch-Partenkirchen, en Bavière. Au mieux, en démocratie, au pire en exil. Selon l'angle qu'elle met en avant.

Les deux sœurs s'aiment beaucoup et elles insistent beaucoup pour se le prouver.
Même si leurs propos claquent comme des coups de feu.
L'essentiel de leur vie est désormais derrière elles. Et elles passent leur temps à se chamailler en remâchant des querelles et des souvenirs dévalués et hors d'atteinte.
Que pourraient-elles faire d'autre, à leur âge et dans leur situation ?

Garmisch-Partenkirchen  {Giza à Erzsi]

"Tu avais raison, Erzsi ! Pardonne-moi !
J'avoue que la jalousie a joué un certain rôle dans mon inquiétude. Non parce que je suis infirme alors que toi tu es toujours  en mouvement, pleine de vie...
Je crois que si nous nous aimons tant, c'est parce que nous avons toujours quelque chose à nous envier."
P. 21

Mais ne voilà t-il pas que Mme Orban tombe amoureuse d'un vieux chanteur d' opéra qu'elle connaît depuis toujours.
L'homme est vulgaire, goinfre, mais l'amour est aveugle et sans âge. Croit-elle.
Et le ton devient âpre entre les deux sœurs et les échanges en rafale.

Risibles amours. Séniles querelles. Les deux sœurs finissent pourtant par tomber dans les bras l'une de l'autre dans une fin grand-guignolesque et ridicule.

Il faut dire que l'auteur n' est pas tendre avec ses personnages.
Les dialogues sont brefs, incisifs, cruels et comiques bien entendu !

LA PHOTO
"Ce que représente cette photographie surexposée et la date où elle fut prise ne peuvent être que l'objet de conjectures.
Ce qui est sûr, c'est qu' on y voit les deux filles Szkalla, en robe vaporeuse de tulle, les cheveux au vent, en train de dévaler une colline en riant et en faisant des signes.
Mais vers qui ou vers quoi couraient et pourquoi se réjouissaient-elles ?
Cela demeure une énigme.
P. 137

Peut être pourra t-on lui reprocher d'être  un tantinet trop expéditif.
Mais Orkeny choisit le grotesque et l'absurde. Et c'est son choix.

Récupéré


mots-clés : #famille
par bix_229
le Mar 25 Juil - 22:31
 
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Sujet: István Örkény
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Donald Antrim

La Vie d'après.

Tag famille sur Des Choses à lire - Page 11 La-vie10


Donald Arnim écrit cinq ans après le décès de sa mère, une femme originale, puis fantasque puis sévèrement alcoolique. qui a autant souffert qu'elle a fait souffrir son entourage. Qui a terrorisé ses enfants étant petits, s'en est sans doute souvent mal occupée, mais parfois bien, et a su leur inculquer un amour particulier, une fidélité qui les a tenus toute sa vie proches d'elle dans leur éloignement, et au moment de sa mort. Donald Arnim  rapporte, au fil de sa mémoire des faits éparts, raconte l'histoire de personnes qui ont marqué son enfance et son adolescence (un oncle, un ami de passage, un grand-père), sans doute en recherche d’adultes référents, et qui ne trouvait le plus souvent que des losers. Mais des losers qui ont compté.

Ce livre est un hommage à une mère défaillante mais aimée, une mère souffrante aussi, sans chronologie, sans direction fixe, par témoignages au coup par coup dont certains pourraient faire des nouvelles.
Donald Antrim ne recherche pas la cohérence mais cherche à laisser une trace, un hommage à cette mère qui sur son lit de mort lui a demandé de lui dédier un livre. Un livre si ancré dans la réalité de l'auteur, enfant puis adulte, qu'il ne me revient pas de le juger mais juste de dire qu'il m'a touchée.


mots-clés : #famille
par topocl
le Lun 17 Juil - 20:33
 
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Sujet: Donald Antrim
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Joyce Carol Oates

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Bellefleur

Ceci est une oeuvre de l'imagination, et doit obéir, avec humilité et audace, aux lois de l'imagination. Que le temps se noue et se déploie, puis s'efface, pour redevenir formidablement présent ; que le "dialogue" se fonde parfois dans le récit et dans d'autres conversations présentées de façon conventionnelle ; que l'invraisemblable fasse autorité et soit investi d'une complexité habituellement réservée à la fiction réaliste : l'auteur l'a voulu ainsi. Bellefleur est une région, un état de l'âme, et il existe vraiment ; ses lois, sacro-saintes, sont tout à fait logiques.»

Voici l'introduction de J.C.Oates pour ce merveilleux roman, parfaite, tout est dit, lecteur oublie la rationalité et pénètre dans le monde fascinant, délirant, fantaisiste de cet auteur talentueux.

Bellefleur, roman de 900 pages de pur bonheur, saga d'une famille qui, tout au long du XIXe siècle, va connaître un destin surprenant parfois, dramatique toujours, au travers des avancées de ce siècle, sans oublier la guerre de sécession, les conflits sociaux, tout est évoqué avec la finesse de JC Oates.

Cette famille influente, possédant un empire immense qu'elle perdra au fil du temps et que, Léah, une femme déterminée essaiera de rétablir coûte que coûte.

De nombreux personnages dans cette saga, deux frères que l'on retrouve tout au long du roman, Gidéon, époux de Léah, Ewan, et parmi d'autres...  Jedediah, un illuminé qui part vivre en ermite sur une montagne, un tueur en série, des animaux étranges, des pièces hantées, des disparitions inexpliquées, toute une série de personnages tous plus captivants les uns que les autres et  décrits avec le style inimitable de J.C.Oates.

Vu ce foisonnement de personnages au travers de différentes époques, il est utile de de se référer parfois à l'arbre généalogique judicieusement mis en première page.

J'ai adoré !


mots-clés : #famille
par simla
le Lun 17 Juil - 8:17
 
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Sujet: Joyce Carol Oates
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