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Georges Brassens, Lettre à Toussenot

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15 résultats trouvés pour erotisme

Paul Léautaud

Journal particulier 1933

Tag erotisme sur Des Choses à lire Journa14

Paul Léautaud, soixante et un ans, qui a déjà Anne Cayssac (« le Fléau ») comme maîtresse depuis dix-huit ans, est invité chez elle par Marie Dormoy, une bibliothécaire du milieu littéraire et artistique gravitant autour du Mercure de France, et qui ne le séduit guère.
« Et ce n’est pas que je tienne à aucune aventure. Franchement non. Ma tranquillité, ma santé, mon travail. »

« Enfin, raté, raté, raté, comme il arrive toujours en pareil cas, comme il m’arrivait même quand j’étais jeune. Tout est, chez moi, une affaire de tête. Si la tête ne marche pas, bonsoir. J’ai dû lui laisser une fichue opinion de moi. »

Dans le même temps abordé par une « dame de La Varenne », il cherche à éviter ces relations.
« Mais sans le vrai attrait, pas de vrai plaisir. Je parle pour moi ! On ne fait rien de bon cœur. Je ne sais même pas s’il n’y a pas : mauvais cœur. »

Rapports sexuels aboutis avec Marie (version que cette dernière contestera dans ses Mémoires), suivis de craintes hypocondriaques, et liaison de plus en plus suivie.
« J’ai relu mes notes, la même chose que pour le Fléau au début : pas mon type, pas attrait complet, et ceci, et cela. Et Dieu sait ce que je suis devenu dans la suite, à l’égard du Fléau. Que cela ne m’arrive pas avec M. D., je le souhaite vivement. »

« Je ne suis pas si éteint que je croyais et craignais. Cela n’a été qu’un moment. Cela vaut tout de même mieux. Ce qui ne m’empêche pas de penser dans quelles histoires suis-je en train de m’engager. Voyez-vous qu’elle se prenne au jeu et se mette à tenir à moi. Grands souhaits que non. »

Importance des gestes impudiques, des propos polissons, qui l’excitent, comme leur correspondance.
« Elle s’est payée du plaisir ce matin avec abondance, mais j’ai eu l’occasion de la regarder une minute : quel manque de grâce sur le visage dans le plaisir. Comme les femmes peuvent offrir des physionomies différentes, les hommes aussi sans doute. »

Maladresses (elle est trop souvent « malade » à son goût) :
« (Ses avortements, quatre fois.) J’ai commis alors un impair, ne pouvant pas me douter qu’elle y serait à ce point sensible, en lui disant en plaisantant : « Tu aurais mieux fait d’avoir quatre enfants. » – Ce qui lui a amené des larmes, presque à pleurer pour de bon. Est-ce souvenir d’hommes qu’elle a aimés, est-ce sorte de sensibilité maternelle ? J’aurais certes mieux fait de ne pas tenir ce propos. »

Léautaud regrette qu’elle ne soit pas « jolie », ni assez démonstrative dans l’acte ; ils échangent des petits mots, qui ne sont pas sans une certaine goujaterie de sa part.
« Elle n’est pas jolie. Elle est comme un mannequin quand elle fait l’amour. Elle n’a rien de très agréable à montrer quand elle est nue. Elle devrait comprendre cela.
Quoiqu’il soit bien agréable, telle qu’elle est, de l’avoir l’été, pendant l’absence du « Fléau ». Surtout, maintenant, que tous les deux arrivés à une certaine intimité et liberté physiques. Tout est ainsi dans la vie, dans tous les domaines : il faut savoir se contenter d’à peu près.
Je comptais pourtant bien m’offrir ce soir une séance. »

Et effectivement, c’est lui qui la poursuit, quoiqu’il en dise.
« J’ai encore fait cette remarque : elle ne prend un visage un peu intéressant qu’après avoir joui trois ou quatre fois. Mais pas moyen de la faire parler. Elle rit quand je lui reproche son mutisme. « Au fond, tu voudrais que je te dise des cochonneries. Moi je trouve que dans la jouissance on n’a pas besoin de parler. » Elle est d’une école qui n’est pas la mienne. »

Il est méfiant aussi à propos de son Journal littéraire, que Marie l’engage à céder à sa bibliothèque (en lui en conservant l’accès).
Il est bon de rappeler que Marie Dormoy, elle-même écrivaine, devint la dactylographe du Journal littéraire, et contribua essentiellement à faire publier l’œuvre de Léautaud.
Cru voire cuistre, regard clinique, ce journal privé m’a paru tel que pourraient le rédiger nombre d’hommes – et ce peut être un regret de ne pas l’avoir fait !

\Mots-clés : #autobiographie #erotisme #journal #sexualité #vieillesse
par Tristram
le Mar 8 Aoû - 12:35
 
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Sujet: Paul Léautaud
Réponses: 9
Vues: 430

Ihara Saïkaku

Histoires de marchands

Tag erotisme sur Des Choses à lire Histoires_de_marchands
L’Époque d’Edo (1603 – 1868) a vu trois écrivains se distinguer, chacun dans leur genre : Bashô dans le haïku, Chikamatsu dans le théâtre et Ihara Saïkaku dans des textes en prose qui dépeignent la vie urbaine d’alors, à Edo, donc, ou à Ōsaka, sa ville natale. On est frappé par ce réalisme des petites choses, cette recherche du détail, qui dans Vie d’une amie de la volupté, pouvait être assez étourdissante. Avec ces Histoires de marchands, la vue d’ensemble est peut-être moins négligée par le conteur, au détour d’une généralité ou d’une fabuleuse description.

Ihara Saïkaku a écrit:À l’ouest du pont de Naniwa s’alignent à perte de vue les maisons de milliers de courtiers, et les murs blanchis des magasins le disputent en éclat à la neige au point du jour. Les sacs de riz s’entassent en pyramides comme autant de montagnes qui se seraient déplacées, et quand partent les files d’hommes et de chevaux, l’on dirait d’un tonnerre souterrain qui ébranle les grands chemins. Chalands et barques à l’infini voguent sur les flots des rivières, comme feuilles de saule au vent d’automne, et les piques à riz que des jeunes gens manient avec vigueur semblent une forêt de bambou où gîte le tigre; les feuilles de registres tourbillonnent et les boules des abaques crépitent comme grêle; sur les trébuchets, le maillet sonne plus haut que la cloche qui annonce deux fois six heures, et le vent qui de la fortune agite les tentures des portes.



Histoires de marchands contient cinquante textes de trois ou quatre pages, au cours desquels on passe souvent d’un personnage à un autre ; cent personnages qui rencontrent l’infortune ou la fortune en espèce sonnantes et trébuchantes (à propos, le traducteur fait là un choix vraiment très discutable qui est de remplacer la monnaie japonaise de l’époque par doublons, écus et deniers). Saïkaku décrit diverses façons d’ordonner sa vie, des tempéraments : vivre au jour le jour ou voir à longs termes n’ont pas les mêmes conséquences. La galerie des caractères s’étend, pingres, roublards, sages ou ingénieux, ayant des ambitions plus ou moins grande sinon excessive. Il est si difficile de gagner de l’argent, si facile de le perdre, clame les personnages à plusieurs endroits, et pourtant nombre d’entre eux de découvrir des moyens d’en acquérir rapidement : les japonais de l’époque tenaient Histoires de marchands pour « un traité sur l’art et la manière de faire fortune » bien qu’il n’y ait pas d’accord parfait entre les différents discours du livre ; épargne, crédit, abstinence, chance ou talent sont tour à tour fin mot de l’histoire. Mais pour nous ces Histoires de marchands constituent des témoignages plutôt vivants (bien qu’assez répétitifs) d’une minuscule comédie humaine en quelques sortes, d’une société partagée entre les riches et les pauvres, mais où les rôles changent souvent.

Lu le 17 septembre 2022

Vie d'une amie de la volupté

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On trouvera dans ce livre d’innombrables détails sur Yoshiwara, où la narratrice, cette « amie de la volupté », passa sa vie, y exerça le métier de « marchande d’amour ». Sachant quelle importance eut ce quartier, qu’il se peut qu’il fut dans une certaine mesure le reflet de la société nippone du dix-septième siècle ; on peut presque se dire que le roman de Saikaku va, à la manière d’un guide, nous faire pénétrer dans les arcanes de cette culture ancestrale. On fait fausse route. Au lieu de réalisme, parlons plutôt d’une minutie qui nous perd dans une multitude d’usages minuscules, dans les vêtements ou les oreillers « de bois ». On reprend quelquefois son souffle en profitant du talent de l’haïkiste pour tracer fugacement un paysage.

Ihara Saïkaku a écrit:Les bonzesses, pour la plupart, portaient un vêtement ouaté en coton, couleur bleu clair. De largeur moyenne, leur ceinture, en étoffe de soie ryûmon, était nouée par-devant. Un voile noir, en soie habutae, leur enveloppait la tête. Pour coiffure elles avaient un chapeau en forme de champignon conique, faits de carex tressé, fabriqué originellement par O-Shichi de Fukae. Elles portaient toutes sans exception des chaussettes de coton renforcées de festons ondulés faits de fils de même matière. Leur pagne de soie était court. Leur tenue, uniforme. La boîte dont elles étaient munies contenaient des amulettes du temple de Kumano, des coquillages sugai et une paire des assourdissantes claquettes yotsu-take.


En fait de reflet, nous en avons un aux contours indiscernables, et c’est peut-être cela qu’on appelle le « monde flottant », c’est-à-dire un monde fait d’autant d’impermanence que d’apparences, de tromperies, de jeux et de mensonges, en somme, d’irréalité. On s’y perd à plus forte raison s’il on est un lecteur occidental et néophyte en culture japonaise (et même si on ne l’est pas, j’imagine). Les intrigues, fourberies et vicissitudes racontées sont peu dissemblables mais sont assez souvent dotées de vérités psychologiques.

Lu le 3 Novembre 2019


\Mots-clés : #erotisme #nouvelle #viequotidienne
par Dreep
le Dim 18 Sep - 22:17
 
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Sujet: Ihara Saïkaku
Réponses: 3
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Akiyuki Nosaka

Le Dessin au sable et l’Apparition vengeresse qui mit fin au sortilège

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Dans l’ère Edo (début XIXe), Senkichi-des-lavoirs-aux-morts vit des dépouilles récupérées sur les défunts ; il recueille une pélerine, Tomi, belle jeune fille à la recherche de son père, Yoshinosuke, dont pour se faire reconnaître Koto sa mère mourante lui donna un dessin de sable (poudres de coquillages colorés sur un papier encollé) :
« Par tous ses replis secrets d’où perlait une sève qui ruisselait en multiples filetis limpides, la vulve donnait l’impression d’épancher l’amour éternel de Koto, de pleurer son affliction pour un Yoshinosuke qu’elle n’avait finalement jamais pu revoir. »

« La trace de sa liqueur reportée sur le papier, elle la saupoudra de sable mêlé du sang qu’elle venait de cracher, reproduisant du même coup, avec une vivante fidélité, son propre sexe : "Il te conduira jusqu’à lui. »

Mais très vite Senkichi médite de profiter de cette aubaine ; sa femme O-Den étrangle Tomi et, apprêtée par O-Roku l’avorteuse, la propose contre rémunération à cinq impuissants pour qu’ils retrouvent leur ardeur en dépucelant et abusant le cadavre. Le premier est Awajiya, celui qui ruina sa famille et força sa mère à l’épouser ; le second est Bonten le devin, qui fit croire à Koto que Yoshinosuke était mort ; le troisième est le voleur Tokuji le démon-pire-que-la-peste, qui déroba le signe de reconnaissance que Yoshinosuke avait laissé à Koto ; le quatrième est le maquereau Kanta, qui vendit cette dernière à un lupanar ; le dernier, Yoshinosuke, son père, sera finalement écarté car le cadavre est en trop mauvais état. En fait ce dernier donne naissance à une petite fille − qui bientôt tète le membre de Senkichi, jusqu’à ce qu’il en meure. Devenu nécrophile, Awajiya trépasse, enlacé à un squelette de femme : c’est la fille de Tomi, malédiction qui se venge un à un des violeurs de sa mère au moyen de dessins au sable.
C’est extrêmement bien documenté (et exotique), comme de coutume chez Nosaka ; ici, peut-être en facétieux contrepoint à l’horreur :
« La boutique de cosmétiques que tenait l’épouse de Tokuji le démon jouissait d’une renommée générale en ville, grâce surtout à sa "crème de beauté", un produit maison, mélange de jus de poire, de peau blanche d’œuf, de rosée prélevée sur des chrysanthèmes et de lessive. S’en frotter redonnait une belle fraîcheur au teint, au point qu’elle faisait à présent délaisser comme vulgaires les autres fards, carmins et poudres de riz, et que tout le monde se l’arrachait, depuis les courtisanes et geishas jusqu’aux filles de bourgeois et épouses de guerriers. La boutique, qui, cela va sans dire, offrait en outre un choix complet de sachets de son, de fiente de rossignol, de graines de chrysanthème, de fard d’Ise au mercure, de "poudre de terre" bon marché, ne désemplissait pas et résonnait du matin au soir de joyeuses voix féminines. »

Je ne connais pas de danse macabre de la mort et du sexe approchant celle-ci en littérature (même si j’ai pensé à Maupassant, et à d’autres auteurs japonais, comme Tanizaki ou Akutagawa) – merci Pinky pour la découverte !

\Mots-clés : #erotisme #fantastique #mort
par Tristram
le Sam 10 Sep - 13:09
 
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Sujet: Akiyuki Nosaka
Réponses: 28
Vues: 1903

Georges Perec

Les Revenentes

Tag erotisme sur Des Choses à lire Les_re10

Prière d'insérer :
« − Vous avez lu quelque part que la lettre la plus fréquemment utilisée de la langue française était la voyelle "e". Cela, bien sûr, vous a semblé injuste, et même intolérable, et vous avez décidé d’agir. – Vous avez donc pris un dictionnaire de la langue française et vous avez recueilli tous les mots "sans e". Vous vous en êtes servi pour raconter une histoire que vous avez appelée, évidemment, La Disparition. – Néanmoins, vous n’étiez pas entièrement satisfait. Il vous semblait que vous n’aviez fait que la moitié du chemin. Vous avez donc récidivé, en prenant, cette fois-ci, les mots ne comportant que la voyelle "e", c’est-à-dire les mots "sans a", "sans i", – "sans o" et "sans u" ("y" est une semi-voyelle et mérite un traitement particulier). Vous vous en êtes servi pour raconter une histoire qu’à juste titre vous avez intitulée “Les Revenentes”. – Vous serez peut-être surpris de constater que vos deux ouvrages se ressemblent par de nombreux traits bien qu’ils n’aient aucun mot en commun. »

L’intrigue est confuse, entre la convoitise des gemmes de Thérèse Merelbeke et le libertinage au sein de l'évêché d'Exeter, notamment à cause de la difficulté à lire cette histoire (gêne beaucoup plus grande, dans mon souvenir, que pour La Disparition).
Perec prend rapidement des libertés avec l’orthographe, qui use de l’homophonie jusqu’au calembour :
« Mets le chef reste ferme et prétend qe Thérèse est décédée ! »

Le « i » est rendu par deux « e » :
« Entre Frence et Engleterre, le jet fend l’éther. Thérèse prend le thé et feyette négleegemment l’Express »

Les jeux de mots deviennent abracadabrants :
« T’es percé, mec, j’vé te descendre qe c’en est pédestre ! »

Le franglais est appelé à la rescousse :
« J’erre vènement de mess en self et d’estemeenet en denceengs. »

Puis le récit vire à la débauche licencieuse comme au burlesque :
« Estelle relève l’embètente leeqette de l’Evêqe, besse le sleep (c’est éveedemment qelqe sleep « Emeenence », « the best ») et de ses feengers experts encercle le membre frêle de l’Evêqe. »

La contrainte que s’est imposé Perec donne quand même de savoureuses phrases.
« Teek tek, teek tek, le temps se trène. »

Une référence de circonstance à La Lettre volée de Poe :
« − Certes, mets je le décèle ézément : Te rémembères les « Lettres Menqentes » : le meyer recette de céler est de sembler lesser en éveedence ! »


\Mots-clés : #erotisme #humour
par Tristram
le Mar 6 Sep - 12:26
 
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Sujet: Georges Perec
Réponses: 38
Vues: 2125

Louis Calaferte

Septentrion

Tag erotisme sur Des Choses à lire Septen10

Départ en fanfare, provocateur, rageur : d’entrée le sexe (féminin), puis les cabinets où le jeune ouvrier en usine se réfugie pour dévorer les livres (de grands auteurs littéraires, beaucoup d’occultisme aussi).
« Il y eut une époque où, dans les livres, le sens d’une bonne partie des mots m’échappait. Grâce au seul moyen de la lecture, je me suis lentement familiarisé avec un vocabulaire élargi que je n’avais jamais employé ni entendu employer autour de moi. Cette façon ardue d’appréhender la langue m’a laissé un immense amour des mots. »

Il délire frénétique et baroque dans « l’hémorragie des images ».
« Le ton est donné pour la journée. Ce sera encore foutre et histoire de foutre.
Marmelade sexuelle d’un bout à l’autre. Chaque femme passée au crible en un coup d’œil. Ce qu’elle pourrait donner, tenue, basculée dans son plaisir, le râle à la gorge, folle, bouche ouverte, cette extase de la peau, proximité du crime, les approches du sang, corps révulsé, sexe crémeux, ventre au sabbat, incandescent, violet, se gonflant comme un sac pour cracher, hoquetant, les jets tièdes de sa jouissance. Ce qu’elles pourraient donner, toutes, renversées, abattues là, à même le sol, piégées comme des bêtes au supplice. Offrande du sacrifice de chair sur un autel de terre battue piétinée par les hommes. Ce que peuvent être ces femmes inapprochables qui glissent sous nos yeux, une fois cramponnées, enfoncées sur un sexe rigide, solidement empalées, n’ayant plus pour seul but que de livrer en un instant la densité de plaisir qui les envenime. D’où nous vient cette irrépressible tentation de lever le voile de nos ténèbres comme on lève la jupe d’une fille pour voir et savoir… Et peut-être n’y a-t-il rien en dessous que cette fente stupide, mollement refermée sur un inextricable tunnel de succions veloutées, de caresses moites, filandreuses, d’anfractuosités mouvantes. Entrelacs de tentacules, de roches bosselées qui encerclent, dominent de minuscules ravins parsemés de ventouses flasques. Abîmes miniatures. Grouillants. Convulsifs. Parés de fines membranes ouatées. Cette fente boursouflée qui se resserre doucement sur un funambulesque univers d’éruptions squameuses, hérissée d’une multitude de petites lames, de canifs, de couteaux tranchants et de crocs invisibles, gélatineux, pointus. Souple dentition de faune marine. Cartilages ensanglantés, dressés en rangs compacts au bord de l’escarpement de gouffres caoutchoutés, spongieux, qui absorbent, pompent, refluent, épanouis et profonds comme un regard de bête morte. Cette mâchoire, cette mâchoire utérine, avide et insatiable, sécrétant l’iode et le sang. Cette fente, cette cicatrice effilée qui ne s’écarte jamais que sur un monstrueux sourire sans fin. Noir. Béant. Un sourire édenté. Étrangement lascif. Peut-être n’y a-t-il rien d’autre au bout de notre inquiétude, et pour toute réponse, que l’incoercible hilarité muette de cet orifice gluant. »

(Ça continue ad libitum, je limite l’extrait.)
Quoique toutes les femmes soient avides de sexe, Nora est exceptionnelle (érotisme torride garanti).
« Mlle Nora Van Hoeck, avec sa démence ovarienne et cette inépuisable citerne de foutre qu’elle semblait avoir en réserve quelque part dans le ventre, était à mon sens le spécimen qui me convenait on ne peut mieux. »

Comme il est fauché, elle lui propose de l’entretenir, ce qu’il accepte avec empressement (dans un premier temps), prêt à tout pour échapper au médiocre troupeau des petits ouvriers et employés (les « buffles »).
« Petits quartiers de pauvres. Mal fichus. Blottis. Toujours quelques persiennes déglinguées. Quelques lézardes dans le crépi des façades. Toilette mortuaire sur la peau nickelée d’un cadavre ancien. Impression d’immense fragilité. Et derrière les murs, des hommes qui reposaient. Un ronflement, parfois, qui enjambait une fenêtre ouverte, cabossait l’obscurité. Des pleurs d’enfant, réguliers, persistants, échappés à l’aveuglement de la nuit, loin, loin, comme coulés dans l’épaisseur même des murs au fond de cette enveloppe de ciment et de pierres. Écho rebondissant d’une porte d’entrée fermée quelque part par une main invisible. Les bruits passent par la caisse de résonance. Je m’effaçais sur le silence. Ligne métallique des poubelles de guingois au long des ruelles étriquées. Comme des chapeaux difformes mis en place avant que ne s’allument les feux de l’illusion. Haie de parade d’un monde de détritus, sur chaque trottoir, des deux côtés. Rues trempées de sommeil, décalquées sur le noir. Architecture indécise d’après la fin des siècles. J’aimais cette paix légère. Galon de nuit. J’aurais pu être le dernier survivant valide à la suite du cataclysme sidéral. Peut-être allais-je tomber au tournant de la rue prochaine sur un tas de noyés parmi lesquels je reconnaîtrais infailliblement le corps mutilé de Mlle Van Hoeck dans sa chemise de nuit saumon à volants noirs, ses cheveux agglutinés en touffes au sang sorti de ses narines. Un peu plus loin, il y aurait un râtelier jauni abandonné par mégarde au moment de la panique finale dans la vitrine d’un grand magasin, témoin absurde de la civilisation du fer. Un vieillard décapité, accroupi, dont les mains tâtonnantes essaieraient de rassembler les débris d’un monocle brisé entre les pavés. Ou un pénis de cheval à demi sorti de son fourreau de poils, se contorsionnant dans la rigole comme un long ver rouge – pourquoi pas ? »

Ça c’est en attendant d’avoir écrit son premier livre, car il sera écrivain.
« Cette nouvelle rencontre, par exemple, était prévue, me semble-t-il, pour s’insérer dans la longue chaîne des connaissances précédentes. Jeu de cubes. Un élément de plus dont il m’appartiendra dans l’avenir de dégager la signification. »

« C’est toujours dans des circonstances impraticables que l’envie d’écrire vous tombe dessus sans prévenir. Je crois que c’est l’une des nombreuses raisons pour lesquelles on n’écrit jamais exactement le livre qu’on avait initialement projeté. […]
Je n’écrivais donc jamais qu’en marge des événements. »

« Écrire, c’est ne jamais trouver. À quoi bon en attendre autre chose ? »

Lorsque le gigolo ne supportera plus sa prostitution, il partira avec la caisse – parvenant toujours à se donner bonne opinion de lui-même. Puis il sombre vite dans la cloche : le parasitisme ne paie plus. Plus que jamais convaincu d’être un grand écrivain en puissance (il n’a pas profité de ses loisirs pour écrire), cette déchéance nous vaut au moins un épanchement éruptif bienvenu après quelques logorrhéiques longueurs de boudoir.
« Les échanges ont lieu sans qu’il y paraisse au-dessus d’un volcan assourdi alimenté par la notion toujours présente d’un formidable rut collectif au cours duquel tout serait enfin permis, dénoué, le rêve des possessions impossibles comblé dans l’instant même, rassasié avec des corps intacts, pris de force, au hasard. Mâles et femelles replongés dans leur sauvage réalité première devant la seule évidence de leurs sexes. Tout se résout par la nutrition et par le meurtre. Chaque contact est comme une tentative de vivisection à froid et sous-entend la mutilation d’une part de soi. Au fond de cette cohue nerveuse, dévorer sa proie pendant l’amour n’a ni plus ni moins d’importance que chercher à dissocier l’esprit de la matière. Si le climat n’est pas aux hémorragies soudaines, vous pouvez verrouiller la porte de la chambre derrière vous et donner à la patiente un mouchoir à mordre. Fœtus, votre jeune fils, coulera gentiment comme si de rien n’était dans la serviette éponge, ses yeux encore éteints et ses petites pattes fluettes repliées, collées à son corps marbré, comme dessinées, gravées à la pointe sèche dans une pâte humide. Déjà, pas un ongle ne manque. Le petit sexe est en place, incrusté sur le ventre. Reste à plier le tout dans la page de dernière heure de la dernière édition du soir, à le jeter dans la cuvette et à tirer la chasse. Onction et baptême du pur néant. Vies parcheminées. Chair et poussière de chair. Fleuve de limon où surnagent sans fin une multitude de cadavres informes de la grosseur impensable du spermatozoïde humain. Univers strictement prisonnier entre les parois opaques d’un ovaire grand format. La seule chose à jamais introuvable dans cet ovaire cosmique, c’est une preuve ou une issue. Inutile de tenter quoi que ce soit pour enrayer la frénésie générale. Le bureau les attend. Les attendent l’usine, le foyer, la maîtresse, le bordel, l’église, le médecin, les urines en bouteille, le repos bien gagné, les pompes funèbres et l’effigie de cire du Créateur impassible qui se veut irresponsable d’un tel chaos et, à cet effet, a troqué son œil de lynx contre une paire de bésicles de la plus inoffensive apparence. Ainsi affublé de verres doubles, Dieu est partout, même dans le trou à la turque si vous y regardez à deux fois. Infiniment rassurant de se dire que la présence paternelle ne nous fera jamais défaut. La foule enfantine caracole, le cœur chassieux. Il faut être fou ou aveugle pour prétendre l’éveiller, fût-ce à force de bombes incendiaires. Longue agonie hébétée. La vie, c’est pour plus tard, en projet, demain, dimanche, pour le jour de la retraite dans le jardinet de la maisonnette durement économisée. Ils vont sûrement se mettre à vivre tout de suite après que leur vie sera assurée. C’est merveille de voir comment, en plein malentendu, chacun peine avec application pour creuser son minuscule abri personnel où il est destiné à être enlisé vivant aussitôt la niche fignolée. Si ensuite, pris de peur ou de nostalgie, il venait à quelqu’un l’idée saugrenue d’entr’apercevoir la lumière d’en haut, c’est le moment où il se rend compte que la niche est si admirablement étanche autour de lui qu’il lui faudrait employer tout le temps d’une seconde existence pour remonter à l’air libre. Se doutent-ils qu’il y a une divinisation de la réalité, et que si l’on parvient à l’atteindre, alors se révèle le point fixe de l’immortalité heureuse ? »

Mais il se trouve des personnes pour l’aider à refaire surface, et il retourne immédiatement à son exécration du travail, et à son érotomanie misogyne, y compris frotteurisme dans le métro.
« Un homme d’aujourd’hui ne peut-il vivre sans se charger des besognes qui lui répugnent ? »

« De sacrées petites salopes toutes, les unes et les autres, quand la nature les a nanties. Il me semble que si j’étais femme et roulée comme celle-là, je n’oserais pas me balader dans cette tenue, le corps moulé à ce point. Ça doit les chauffer quand les regards se braquent sur elles. »

Minables chambres d’hôtels, errances urbaines souvent nocturnes, dettes et emprunts dans une société où tout dépend de l’argent, écriture toujours en projet, femmes toujours en fureur utérine, et toujours la hargne, et ces flux hémorragiques crachés avec ces souvenirs apparemment autobiographiques d’un parasite assumé, et convaincu de sa valeur transcendante...
On pense à Céline, mais aussi à Alphonse Boudard, à la verve d’Henry Miller ou de Cendrars et à la gouaille de nombre d’écrivains du Paris des années cinquante (ainsi qu’à Lautréamont – que Calaferte a lu − pour le déluge verbal révolté ?) – tout en n’atteignant pas, me semble-t-il, la valeur littéraire de la plupart de ces références.

\Mots-clés : #autobiographie #ecriture #erotisme
par Tristram
le Dim 14 Aoû - 14:12
 
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Réponses: 17
Vues: 3101

Belen

Le Réservoir des Sens

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Signé d’un pseudonyme, « Belen » ― Soupault et Mandiargues prétendaient ne pas savoir qui se cachait derrière, on sait depuis de qui il s’agit ― Le Réservoir des Sens est composé d’une vingtaine de nouvelles (ou proses) de trois à dix pages. Il est presque toujours question, pour ces personnages, d’une rencontre intense mais sans suite. Des rencontres étranges, où concupiscence s’accorde avec prédation (souvent féminine) où le désir permet de conjurer la peur et éventuellement la mort. Belen installe une atmosphère par la parole directe de son personnage, jouant sur les mots et sur les mythes (de Circé aux vampires, en passant par Juda et Tantale) pour provoquer une chute plus ou moins attendue sinon quelque peu éculée. Sauf exceptions, où forte d’une situation compliquée, tordue et surtout équivoque, la drôlerie parvient jusqu’au lecteur, comme dans La Fonction créé l’orgasme ou dans la nouvelle éponyme, ou, dans une veine nettement surréaliste, Lorsque la femme parée.


\Mots-clés : #erotisme #nouvelle
par Dreep
le Mer 10 Aoû - 18:40
 
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Sujet: Belen
Réponses: 3
Vues: 146

Michel Rio

Le Vazaha sans terre

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Michel Rio renoue avec l’histoire et le style, certains personnages aussi, de ses premiers romans. Celui-ci commence avec la fantastique (et macbéthienne) scène finale de « l’armée de morts » dans Merlin, matérialisée dans son comté de Cumbria par Alan Stewart, duc de Camlan, l’ami du narrateur-auteur. Ce dernier est également l’amant de lady Laura Savile, comtesse de Badon, cousine germaine du précédent, et assimilée à Morgane.
L’art de la conversation est plus que jamais aristocratique, à la limite de la préciosité.
« Je ne pus trouver qu’un moyen détourné, une citation, façon de créer une distance vis-à-vis de moi-même en raison du procédé et de dire à Laura la vérité à travers les mots émouvants et insondables d’un poète inégalé. »

C’est que notre héros souffre d’une mélancolie métaphysique, crise d’angoisse existentielle au sujet de la vacuité, « de la finalité ou de l’absurdité de la vie » le portant à partir en solitaire à la voile jusque Madagascar.
De l’écriture :
« C’est à la fois une terre d’élucidation, ou plus justement de tentative d’élucidation, et un moyen de rendre intéressant le voyage, de conjurer un peu l’absurdité ou l’ennui, d’introduire un parcours linéaire à travers des cycles sans queue ni tête. »

« Quand j’écris, je m’adresse à moi-même et à personne d’autre. C’est un mélange d’enquête et de création, en aucun cas une communication. »

C’est donc une traversée en mer, au cours de laquelle le narrateur sauve Virginia Fox, une navigatrice solitaire anglaise, occasion de nouveaux dialogues philosophico-érotiques.
« Je pense qu’il n’y a que le mouvement. Pas de but. Un voyage sans destination, sur un océan sans limite. Ce qui fait qu’on meurt toujours en pleine mer. »

Puis le Vahaza (en malgache : Blanc, étranger) retrouve l’île qu’il a quittée à cinq ans, ainsi qu’un crocodile et un ami d’enfance.
« Il me reste le temps. Il ne vient de nulle part, ne va nulle part. Il s’écoule. Il est simplement ce qui est nécessaire aux choses pour changer. Et quand on se met à le compter, il devient la mort. »

Complaisant, demande une certaine indulgence de la part du lecteur pour se prêter à cette dialectique mélancolieuse dans le goût de Diderot.

\Mots-clés : #autofiction #ecriture #erotisme #merlacriviere
par Tristram
le Sam 28 Mai - 12:38
 
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Sujet: Michel Rio
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Akiyuki Nosaka

Les Pornographes

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Dans l’Osaka des années soixante, Subuyan se débrouille avec Banteki et bientôt d’autres comparses dans les commerce et industrie pornographiques. C’est un panorama apparemment exhaustif de ce milieu interlope, qui les mène jusqu’à la réalisation de films et au proxénétisme, avec notamment Cancrelat, qui mérite bien son surnom, et Lagratte, écrivain érotique inspiré par sa mère devenue frigide en se tenant immobile pendant qu’on la besognait à côté de son petit enfant… Combines et professionnalisme se mêlent comiquement dans l’activité débordante de ces acolytes hauts en couleur, rendus au quotidien dans leur misère débrouillarde, subsistant aux dépens de vicieux notables, sans autre perspective que d’aller en prison.
Le récit suit un rythme très vif (dans tous les sens du terme), les picaresques péripéties s’enchaînent sans pause. C’est leste, truculent et même cru, mais c’est aussi la découverte d'une population dans le besoin, sa gouaille rendue avec humour – avec des flashs d’images terribles, comme celle où Subuyan perdit sa mère dans un bombardement de Kôbe, cuite à l’étouffée (le souvenir de la guerre reste omniprésent)…
Outre les fantasmes particuliers à l’imaginaire japonais (notamment les lycéennes en uniforme), on découvre de curieuses caractéristiques de la société nipponne, comme le recours d’entreprises à des exhibitions pornographiques sous-traitées (bien que la pornographie et la prostitution soient illégales et poursuivies par la police).
« En somme, jugeait-elle, faites miroiter un tant soit peu les plaisirs de la vie aux filles d’aujourd’hui et vous verrez, ce ne sont pas les scrupules qui les étouffent. »

Il y a de grandes scènes à la fois cocasses et sordides, comme la comparaison de leur première expérience onaniste, la rencontre scabreuse d’homosexuels et de lycéennes « au bar gay Cocteau », ou encore le cours de pelotage dans le métro…
« − Oui, oh, j’ai un rancard pour faire guide de presse.
− Guide de presse ?!
− Ouais, aux heures où y a presse dans le train, aux heures de pointe, quoi. J’ai un gars qui rêve de se faire prendre en sandwich entre deux minettes. »

Les pornographes sont épris de réalisme, et l’auteur aussi, même s’ils se réclament de l’humanisme !
« T’en as dont le truc est en berne, tout ratatiné, que moi, grâce à mes photos spéciales et mes bouquins, je les aide à redresser la tête encore une fois. Voilà, je rends service, par le fait. Je les compte plus, ceux qui sont venus me remercier jusqu’à maintenant, et ceux qui n’attendaient que ça, tiens, les larmes aux yeux, de se confier à moi. Crois-moi, c’est un métier qui t’assure une place au paradis, ça. »

En parallèle, Subuyan s’éprend de sa belle-fille Keiko (l’inceste revient souvent), est en proie à des problèmes d’érection…
Banteki le photographe se révèle un cinéaste doué, dont le travail s’apparente bientôt plus à l’érotisme suggestif qu’à la pornographie.
Yasuko, qui joue les pucelles pour clients amateurs de virginité, éduquée depuis toute jeune par sa mère maquerelle, envisage de poursuivre en formant sa propre fille.
« Soit talent maternel de pédagogue, soit privilège inné du beau sexe, moins de six mois suffirent à Yasuko pour maîtriser l’art de feindre tant la pure ingénue que la saute-au-paf allumée. »

« D’après elle, on devrait finir par obtenir la femme accomplie avec la petite-fille, ma fille à moi, donc. Ma mère aura été l’exploratrice, moi la pionnière, si vous voulez, et ce ne serait qu’à la génération suivante, la troisième donc, qu’on pourrait vraiment récolter les fruits. »

L’aboutissement de leur questionnement du sexe sera l’organisation de partouzes…
Premier roman, qui d’ailleurs le rendit célèbre, Les Pornographes est évidemment nourri de l’expérience de Nosaka. Sa mère mourut peu après sa naissance, et sa mère adoptive fut tuée dans un bombardement alors qu’il avait quinze ans. Il survécut de larcins et magouilles diverses jusqu’à être envoyé en maison de correction.
Une sorte de Steinbeck érotomane, de Cossery sans inhibitions ni limites !

\Mots-clés : #erotisme #misere #sexualité
par Tristram
le Mar 21 Déc - 11:23
 
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Sujet: Akiyuki Nosaka
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Yasunari KAWABATA

Tristesse et Beauté

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Dès le début, le lecteur apprend que Oki, le personnage principal, se rend à Kyôto avec l’intention de rencontrer Otoko qui y réside ; Oki a violé Otoko, qui avait seize ans, il y a vingt-quatre années de cela, alors que lui-même avait trente et un ans (et était marié avec un enfant) ; elle eut de lui un bébé mort-né avant de tenter de se suicider et d’être internée dans un hôpital psychiatrique ; Oki regrette « d’avoir arraché cette femme aux joies du mariage et de la maternité », qui était tombée amoureuse de lui… et l’est toujours.
Oki est écrivain, et a écrit un roman à succès, son chef-d’œuvre, sur son amour pour Otoko (ce qui a d’ailleurs ravagé sa femme, qui tapait le manuscrit et fit une fausse couche) ; on peut soupçonner une mise en abyme autobiographique, ou au moins fantasmatique…
« Oki avait intitulé son roman Une jeune fille de seize ans. C’était un titre ordinaire et sans grande originalité, mais il y avait vingt années de cela, les gens trouvaient assez surprenant qu’une écolière de seize ans prît un amant, mît au monde un bébé prématuré et perdît ensuite la raison pendant quelque temps. Oki, pour sa part, ne voyait rien là de surprenant. »

Jalouse, Keiko, jeune élève peintre et amante d’Otoko, séduit Oki, puis son fils, pour venger celle-ci.
Roman paru en 1964 au Japon, Kawabata, Nobel 1968, dans l’esprit du temps et du lieu, à partir des faits ci-dessus, crée un chef-d’œuvre de délicatesse, de sensualité, de spontanéité, de psychologie autour de la douce Otoko et de la fantasque, ardente, belle, terrible Keiko. Érotisme de l’oreille et tombes de « Ceux dont nul ne porte le deuil »…
« Mais un roman doit-il être forcément une jolie chose ? »

La réponse en l’occurrence est oui, en tout cas pour la forme. Des reprises avec variations répètent par moments des éléments de l’histoire, effet musical qu’on peut aussi rapprocher d’une conversation naturelle du narrateur. C’est notamment remarquable au début de la partie Paysages de pierres (jardins zen), qui m’a particulièrement plu.

Mots-clés : #amour #erotisme #portrait #psychologique
par Tristram
le Dim 23 Aoû - 21:25
 
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Sujet: Yasunari KAWABATA
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Ramón Gómez de la Serna

Seins

Tag erotisme sur Des Choses à lire Seins

Dans cette suite de courts textes sur les seins, Ramón Gómez de la Serna montre qu’il est un écrivain des petites formes*. Petites formes qu’il multiplie, pour classer, collectionner les seins, presque dans une perspective Louÿsienne (voir Le Manuel de Gomorrhe), pour pointer les différences ; couleurs, galbes, expression, personnalité, métaphore : le sein a soit une indépendance à l’égard de celle qui le porte, soit est intimement lié à celle-ci autant qu’aux circonstances qui les révèlent. Cette variation n’est pas tout à fait constante, c’est toujours le mamelon recommencé, ré-admiré, peut-être en ce qu’il est toujours à la fois semblable aux autres et unique. C’est l’expérience chaque fois renouvelée avec des mots, des histoires… On admire ce chant malgré ses redondances, peut-être parce qu’il est mêlé de beaucoup d’empathie et d’un peu d’humour.

* : Il l'avait déjà montré, du reste, avec Greguerias ou Le docteur invraisemblable notamment.

C’était une prostituée. Très lucide, elle vit qu’on lui avait volé ses seins, qu’on les lui avait tant pressés qu’il ne restait plus rien de leur substance, qu’on les lui avait dérobés de telle sorte qu’ils avaient perdu leur suc et leur sens. Elle les avait encore, mais ne les possédait plus. Les voleurs, les premiers voleurs venus les lui avaient volé, et la preuve, c’est qu’elle était maintenant incapable de donner à un homme, à celui qui l’arracherait du ruisseau, qu’elle aimerait pour de bon, les seuls seins intéressants, des seins entiers, les seins qu’il méritait. C’est pourquoi elle souriait ironiquement lorsque les nouveaux venus, persuadés qu’elle avait toujours ses seins, se précipitaient pour en jouer. « Vous êtes bien attrapés ! » pensait-elle en les sentant jouer avec le vide, avec des seins absents, satisfaits de sa vengeance, satisfaite de voler ces nouveaux voleurs.


Mots-clés : #erotisme
par Dreep
le Ven 14 Aoû - 10:24
 
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Sujet: Ramón Gómez de la Serna
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Lluís Llach

Lluís Llach
Né en 1948

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Lluís Llach i Grande, né le 7 mai 1948 à Gérone (Catalogne), est un chanteur et romancier catalan. Il est une des figures de proue du combat pour la culture catalane contre le franquisme. En 1965, il rejoint le groupe Els Setze Jutges. Du fait de cet engagement qui l'a conduit à l'exil, il est considéré en Catalogne comme une référence non seulement musicale mais également morale. Sa chanson L'Estaca (le pieu) est devenu un véritable hymne libertaire catalan. Aux élections de 2015 au parlement de Catalogne, il conduit la coalition indépendantiste Junts pel Sí dans la circonscription de Gérone. Il devient député au parlement de Catalogne de 2015 à 2017. Il préside de 2018 à 2019 le Conseil consultatif pour la promotion d'un forum civique et social pour le débat constituant.


Bibliographie

Les Yeux Fardés, 2012
Les Femmes de la Principal, 2014
Le Théâtre des merveilles, 2017

Discographie
Spoiler:




Tag erotisme sur Des Choses à lire Les_ye11

Les yeux fardés

Un jeune réalisateur en mal d'idées vient écouter l'histoire d'un vieil homme aux yeux outrageusement fardés. Ce roman est constitué d'un court prologue suivi des vingt-quatre enregistrements de Germinal Massagué, qui raconte pour l'essentiel sa jeunesse pendant la guerre civile. Pour son premier roman, l'auteur fait preuve d'un certain sens du rythme et de la composition : chacun de ces enregistrements se focalise sur une étape majeure de la formation du narrateur, sans fausse note ni baisse de régime. L'écriture est rapide, les phrases brutes, mal dégrossies, car Lluís Llach se refuse à toute joliesse. Et l'on se rend compte, bientôt, que sa manière ne manque nullement de vigueur, d'efficacité ni de délicatesse.

Si l'on en croit le narrateur, c'est une histoire d'amour qui va nous être racontée. Mais le contexte politique de la guerre civile, le combat des gauches contre le fascisme prennent rapidement le dessus : le singulier ne peut se défaire du collectif, l'histoire d'amour et l'histoire espagnole sont indissociables l'une de l'autre. Il s'agit d'une trajectoire individuelle au milieu de la tragédie collective, une plongée dans la guerre civile à hauteur d'homme, qui la rend pleinement sensible. Il est singulier qu'un si vieil homme, racontant ses années de formation, puisse ressusciter sa jeunesse avec tant de chair, de nerfs, d'appétits; qu'il recrée enfin ces années d'étourdissements euphoriques, de pulsions vitales et de traumatismes avec une pareille acuité. Le récit trouve son équilibre entre la plongée immersive par laquelle Germinal revit les événements de sa jeunesse, et la prise de distance qui intervient de loin en loin, rythmées par les adresses au réalisateur, qui lui permettent l'analyse rétrospective et la contextualisation de ce que la jeune génération ignore de l'ancienne. Par ailleurs, c'est un livre à double face : une incarnation des élans et des frissons de la chair, mais également une peinture de la destruction; un éloge de l'humanisme et de l'effervescence intellectuelle de cette époque presque mythologique, des aspirations politiques et sociales de tout un peuple, mais aussi un chant funéraire et le récit d'un naufrage; en somme, un conte d'amour qui devient un conte de folie et de mort. Parallèlement à cette trame se noue une discrète histoire d'amitié hors champ, entre Germinal et le réalisateur silencieux, que l'on comprend à demi-mot.

Comme je l'ai dit, ce roman est formé d'entretiens qui peut-être serviront de base à un scénario de film. Ainsi, bien qu'il ne puisse être réduit à un simple matériau de travail pour le cinéma, ce roman forme-t-il un appel aux arts visuels. Chaque adresse au réalisateur nous rappelle la raison de ce récit, et nous incite à le transposer au cinéma. Et de même pouvons-nous envisager le personnage du cinéaste comme un avatar du lecteur, et son film en germe comme une métaphore de l'activité imageante de la lecture littéraire.
En revanche, s'il fait son film, le personnage du cinéaste ne se contentera certainement pas d'animer l'histoire qu'il a entendue. Ce n'est pas un documentariste, c'est un réalisateur de fiction : sans nul doute, en se l'incorporant, fera-t-il de cette histoire quelque chose d'entièrement nouveau (avec des personnages, des lieux et une trame tout autres). Et ainsi devrait faire le cinéaste qui voudrait adapter Les yeux fardés : réaliser le film qu'est venu chercher le réalisateur fictif dans l'histoire de Germinal Massagué.


Mots-clés : #amour #erotisme #guerredespagne #identitesexuelle #jeunesse #xxesiecle
par Quasimodo
le Mer 12 Fév - 21:16
 
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Sujet: Lluís Llach
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André Hardellet

Le parc des archers
Suivi de Lady Long Solo

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- Le parc des archers: roman, 1962, 215 pages environ.
- Lady Long Solo: nouvelle, 1971, 35 pages environ.
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Le parc des archers













Roman écrit au "je", et ce "je" se prénomme André et est écrivain de profession, donc le héros-narrateur n'est pas même masqué !
Idem, au reste, en ce qui concerne les noms propres utilisés (Vincerennes pour Vincennes, Saint-Macloud pour Saint-Cloud, etc...- seul Cortezzo, sur la riviera italienne à ce qu'il semble, m'échappe et semble une contraction de Cortina d'Ampezzo, qui n'a...rien à voir).


Au retour "d'un long voyage à l'étranger" André Miller, écrivain, se fait alpaguer dans le bois de Vincerennes par des membres des forces de l'ordre au bord d'un étang où il souhaitait retrouver un moment de son enfance. S'ensuit une plongée critique dans un monde en devenir ("La Gale") à la fois déshumanisé, policier, et attentant au moindre petit plaisir de l'existence.

Une soirée mondaine permet la rencontre avec deux personnages principaux, Frank Blake et Florence van Acker; caractères très fouillés qu'Hardellet dévoile peu à peu au fur et à mesure du déroulement du livre.  

Le peintre "Stève" Masson, personnage qui semble un peu fil-rouge chez Hardellet (il est le héros principal du Seuil du jardin, et c'est sous ce pseudo qu'Hardellet fit paraître Lourdes, lentes), fait quelques apparitions dans ce roman (il est devenu aliéné, sous camisole chimique et traitements).


Du mélange couple - insurrection - amitié - combats de rue - monde totalitaire sortent bien des péripéties, qu'on évitera de narrer ici. Roman attrayant, fort bien mené, même si c'est presque dans les séquences un peu digressives que je trouve que le bonheur de lire Hardellet atteint son summum.

Je regrette, certes avec mon regard d'occidental de 2019, le traitement de l'homosexualité - même si bien sûr les propos tenus par André Miller doivent être ramenés à l'époque d'écriture, etc... Et puis cela permet de se remémorer le chemin parcouru depuis ce temps-là, quand même pas si éloigné.

Jeter un coup d'œil aux actualités de 1962 et années précédentes pour essayer de trouver des correspondances entre cette fiction et ce temps-là n'a rien donné (peut-être n'ai-je pas bien cherché ?) - je pense qu'il est impossible de voir dans ces lignes-là une évocation ou une allégorie des guerres d'Indochine et d'Algérie, par exemple. De même une référence à l'occupation nazie ne fonctionne pas: je pense qu'Hardellet a vraiment tenté de signifier un avertissement au générations futures, dont la nôtre.

Chapitre XII La Section psychologique a écrit:"Vous êtes un petit joueur de banlieue, et c'est pour vous le démontrer que nous vous avons prié de venir faire un tour à la D.S. Vos amis politiques, eux, ont un programme et des buts définis, une organisation qui les soutient, vous, vous enfourchez des nuages. Ils vous utilisent provisoirement à cause de votre talent. Le romantisme est mort depuis pas mal d'années, monsieur Miller.
- Est-ce pour m'en faire part que vous m'avez prié de vous rendre visite ?"
Il haussa les épaules; il suait un mépris écrasant dans toute sa personne.  
"Vous ne vous nommez pas André Miller mais Durand et vous exercez l'emploi de comptable dans une compagnie d'assurances. Vous sortez d'une clinique psychiatrique où l'on vous a traité pendant six mois pour troubles mentaux. Votre état civil, votre profession, votre passé, c'est nous qui en disposons, qui vous les attribuons comme il nous plaît. Des témoignages, nous en produirons autant qu'il le faudra. [...]"  
 


La séquence du Parc des Archers proprement dite (c'est le titre de l'un des chapitres en plus d'être le titre de l'ouvrage), très chargée en onirisme, en symbolique, est un pur régal "hors tout". En prime, un érotisme léger, suggéré, flotte sur l'ensemble du livre.

  

Mots-clés : #erotisme #insurrection #intimiste #jalousie #politique

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Lady Long Solo







En voici l'entame:
Je revenais d'une banlieue spongieuse où Fulcanelli m'avait donné rendez-vous.
À la station, j'attendis en vain le car qui devait me ramener à Paris et que j'avais pris plusieurs fois auparavant; je voulus me renseigner dans un café distant de quelques centaines de mètres, mais il était fermé.
Plus d'une heure s'écoula ainsi, puis survint un très vieux taxi, semblable à ceux de la Marne, et je fis signe au chauffeur dont l'aspect s'accordait à l'antique guimbarde "À Paris, lui dis-je, Place de la Concorde. - Je sais", me répondit-il.  


Nouvelle un peu fantastique, un peu libidineuse, assez onirique. Hardellet semble y reprendre le pseudonyme de "Stève" (Masson). Il y a un autre rappel aux thématiques du Seuil du jardin (voir plus haut): les images emmagasinées, donnant la possibilité à des scènes de se revivre, ou de se vivre fictivement. Et qui se couple à la fuite du temps...



Fats Waller, avec, évoqué comme "titre préféré" I've got to write myself a letter - bon, c'est I'm gonna sit right down and write myself a letter le vrai titre, on ne va pas chipoter !




Mots-clés : #contemythe #erotisme #intimiste #reve
par Aventin
le Mer 3 Juil - 15:29
 
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Sujet: André Hardellet
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Jean Genet

Sans doute un des plus grands de la langue française, et un des plus âpres également. Toujours à sillonner dans les mondes interlopes, parfois glauques, avec une virulence parfois difficile à digérer, comme un violent coup de poing à l'estomac.

De Genet, pour l'instant j'ai lu Miracle de la rose, Notre-Dame-des-Fleurs, pour la prose. Les bonnes pour le théâtre (excellent souvenir, une bonne claque, très intense et anxiogène).

Et je suis en train de lire le recueil nrf poésie Le condamné à mort et autres poèmes.

Tag erotisme sur Des Choses à lire 41d3f211

Pour l'instant c'est de la poésie métrée (très ... imagée ! Tag erotisme sur Des Choses à lire 1390083676 du Genet pur jus).
(...)

Elève-toi dans l'air de la lune, ô ma gosse.
Viens couler dans ma bouche un peu de sperme lourd
Qui roule de ta gorge à mes dents, mon Amour,
Pour féconder enfin nos adorables noces.


(...)

Mon cachot bien-aimé dans ton ombre mouvante
Mon oeil a découvert par mégarde un secret.
J'ai dormi des sommeils que le monde ignorait
             Où se noue l'épouvante.


Mots-clés : {#}erotisme{/#} {#}poésie{/#} {#}sexualité{/#}
par Invité
le Mer 17 Avr - 16:50
 
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Sujet: Jean Genet
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Éric Laurrent

Tag erotisme sur Des Choses à lire Laurre10

Dans ce roman, le narrateur nous est présenté avec une ironie autodérisoire, comme snob, pédant (Il utilise couramment l'imparfait  du subjonctif et un langage désuet et chantourné).
Un peu sot, mais conscient de l'être. Obsédé sexuel, à cause d'un milieu social et familial confit en bigoterie.

Longtemps frustré sexuellement, il renonce à présenter ses amies  à ses parents. Du coup, ils pensent qu'il est homo. Ils le convoquent un jour pour le sommer de leur expliquer son comportement. Après moult "euphémismes et circonlocutions."

Il considère l'érotisme -pas celui de Bataille ni de Mishima- comme un art- et un corps de femme comme une oeuvre d'art à contempler et un objet de désir à consommer !
Et vice versa...

Bref, il est prêt pour une histoire d' amour ! Une vraie !

C'est un livre vraiment très drôle, très réussi. Meme si l'auteur est frappé du "syndrome de Minuit" -qui consiste à aligner des mots et des phrases allant au grand galop jusqu' à un point[.] éloigné dans l'espace/temps.
Mais il en tire le meilleur parti.

Meux vaut ne pas citer de phrases, très drôles dans le contexte mais qui pourraient passer pour pédantes. Ce qui n'est pas du tout le cas.

Récupéré



Mots-clés : #amour #erotisme #humour
par bix_229
le Ven 29 Mar - 12:11
 
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Sujet: Éric Laurrent
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Alessandro Baricco

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La jeune épouse

ça faisait longtemps que je n'avais pas lu Baricco. Je n'ai d'ailleurs lu qu'un seul de ses livres et à part le souvenir qu'il a été adapté au cinéma avec Béatrice dalle comme actrice je ne m'en souviens pas dutout. mais je crois que j'avais bien aimé.

La jeune épouse est empreint d'un charme un peu étrange, langoureux et violent à la fois, il nous amène résolument dans des codes écartés du réel.
Dés l'ouverture on est frappé par la force expressive du style de l'auteur : j'ai bien vu la scène du levé, l'enfilade en couloir, les portes ouvertes à la volée, les embrassades hébétées de la famille sortie d'une nuit inquiète.
J'ai été un peu chiffonnée par leur nudité ostentatoire et sensuelle, convaincue d'avoir à faire à un érotisme facile de par son transgressif, allons-y pour le soufre de l'inceste littéraire et romantique à mes yeux difficilement attractif etc
Et puis non, Baricco m'a quand même entrainée dans sa lenteur moite, et baroque, son imaginaire sensuel, sa liberté narrative.

Je pourrais dire que je n'étais pas conquise et pourtant des images uniques me restent, qui démontrent la force du voyage créatif.
Un enchantement étrange, où seules des bribes rares n'auront pas été maitrisées (je pense à une ou deux incohérences de ton, la jeune épouse parlant au valet, lors de leur étroite discussion, seuls dans la maison vide, où le lexique soudain trop moderne semble , au détour d'une réplique, rompre la transe involontairement, par exemple) et qui permet de créer des Personnages immortels. le valet m'a beaucoup frappée, il est puissant, magnifique figure.
Des images inouies inédites et in-lues (ça se dit ça ?) comme celle des actions inachevées , pour mieux préparer le retour de villegiature : tiroir entrouvert, fruit à demi pelé, et de multiples foisonnements de temps amorçés pour nier l'arrêt du temps.

Quelques îlots restés inaccessibles : la jeune epouse sale et parée, bon, très érotique mais qui ne me parlais pas, son va et vient sur les genoux du valet, bon, que moi j'ai pas trop aimé, même si la fuite vers les sens prend son illustration dans cette incongruité et ce cap franchi. En fait un contenu très érotique qui ne m'a pas vraiment parlé mais que je reconnais chiadé, sinon original dumoins décliné de manière brillante.
Et un élan , un mouvement, un sens , une "thèse" métaphysique très réussis, que j'ai reçu totalement, sans dutout être dérangée par les choix qui ne m'étaient pas chers, un contenu de sens très spécifique, et un final doublement beau : la mort du père est une scène que j'ai trouvé splendide, et ma tendance à aimer les happy ends s'est trouvée comblée par l'issue du livre.

Un texte où le miroir de l'écrivain- faisant est un pari osé, réussi, un texte un peu vénéneux; comme le mal vivre de l'écrivant qui est exprimé, sublimé; un roman des faux semblants et des réels instinctifs.
C'est beau. C'est vrai.

Mots-clés : #amour #erotisme #famille #huisclos #initiatique
par Nadine
le Dim 24 Mar - 17:26
 
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Sujet: Alessandro Baricco
Réponses: 56
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