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Message par animal Ven 17 Déc - 17:08

Merci pour les extraits. Bonne porte d'entrée à l'auteur ?

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Message par Tristram Ven 17 Déc - 17:17

C'est en fait un livre assez mince, dont je recommanderais la lecture si j'osais conseiller, mais est-il représentatif de l'auteur ? Oui, sans doute. Je n'ai pas précisé qu'il y a aussi un côté humain et touchant lorsqu'il témoigne de son enfance sous le fascisme.
Le message célébrait la fin de la dictature et le retour de la liberté : liberté de parole, de presse, d'association politique. Ces mots, liberté, dictature – mon Dieu – je les lisais pour la première fois de ma vie. Grâce à ces nouveaux mots, je renaissais en tant qu'homme libre occidental.

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Message par Bédoulène Ven 17 Déc - 18:59

racisme inné, j'ai du mal à croire, j'ai plutôt le sentiment qu'on l'acquiert, non ?

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Message par Tristram Ven 17 Déc - 19:06

Il explique très bien que l'inné, c'est le « sauvage », qu'on peut contrôler par l'éducation, et que l'acquis, c'est le « doctrinal », et là on ne peut plus raisonner... Tu devrais le lire !

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Message par Bédoulène Ven 17 Déc - 20:24

j'allonge ma liste, mais ce sera dans quelques mois

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Message par Zorglub Mer 29 Déc - 14:05

J'avais adoré Le Nom de la Rose, tout en regrettant que toutes les phrases en latin n'aient pas été traduites, et je l'ai encore relu cette année. Dans la foulée, j'avais lu Le Pendule de Foucault, sur lequel j'ai peiné, hélas. Je ne me souviens plus quel est le troisième bouquin d'Eco que j'ai essayé de lire, et auquel j'ai renoncé en cours de lecture. Trop dense, trop ardu... J'avoue avoir arrêté là ma découverte de cet auteur.

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Message par Tristram Lun 28 Fév - 10:43

L’île du jour d’avant

Umberto Eco - Page 3 L_zule11

1643, Roberto de la Grive, naufragé lucifuge et noctivague, aborde la Daphne, vaisseau désert mouillé entre une île et un continent tropical.
Le « chroniqueur » qui narre ses aventures dans un pastiche de vieux français-italien d’ailleurs cosmopolite, tout en évoquant les lettres de Roberto à sa dame, feint à la première personne du singulier d’organiser sa restitution digressive, qui rend en miroir la démarche de l’écrivain.
« Il écrivait alors pour lui, ce n’était pas de la littérature, il était vraiment là à écrire comme un adolescent qui poursuit un rêve impossible, sillonnant la page de pleurs, non point pour l’absence de l’autre, déjà pure image même quand elle était présente, mais par tendresse de soi, énamouré de l’amour… »

« Ou mieux, il n’y va pas tout de suite. Je demande grâce, mais c’est Roberto qui, dans son récit à sa Dame, se contredit, signe qu’il ne raconte pas de point en point ce qui lui est arrivé mais cherche à construire la lettre comme un récit, mieux, comme salmigondis de ce qui pourrait devenir lettre et récit, et il écrit sans décider de ce qu’il choisira, dessine pour ainsi dire les pions de son échiquier sans aussitôt arrêter lesquels déplacer et comment les disposer. »
Il raconte du point de vue de Roberto le siège de la forteresse de Casal avec son vaillant père le vieux Pozzo (c’est aussi un roman historique), et en parallèle son exploration de la Daphne avec sa cargaison-cathédrale, jardin-verger et sonore oisellerie, aussi horloges. De plus, Roberto a un frère imaginaire, Ferrare – l’Autre, et un « Intrus » semble être présent sur le navire… Eco rapproche sa situation dans la Daphne (comparée à l’arche du Déluge) à celle qui fut la sienne dans Casal assiégée. Roberto se remémore ses amis, le pyrrhonien Saint-Savin (qui rappelle Cyrano de Bergerac et son L’Autre Monde ou les États & Empires de la Lune) et le savant père jésuite Emanuele, avec « sa Machine Aristotélienne » (c’est également un roman de formation).
L’amour chevaleresque et platonique de Roberto, la Novarese, virtuelle comme un portulan :
« Si c’est une erreur des amants que d’écrire le nom aimé sur l’arène de la plage, que les ondes ensuite ont tôt fait de raviner, quel amant prudent il se sentait, lui qui avait confié le corps aimé aux arrondis des échancrures et des anses, les cheveux au flux des courants par les méandres des archipels, la moiteur estivale du visage au reflet des eaux, le mystère des yeux à l’azur d’une étendue déserte, si bien que la carte répétait plusieurs fois les traits du corps aimé, en différents abandons de baies et promontoires. Plein de désir, il faisait naufrage la bouche sur la carte, suçait cet océan de volupté, titillait un cap, n’osait pénétrer une passe, la joue écrasée sur la feuille il respirait le souffle des vents, aurait voulu boire à petits coups les veines d’eau et les sources, s’abandonner assoiffé à assécher les estuaires, se faire soleil pour baiser les rivages, marée pour adoucir le secret des embouchures… »
Puis son amour se portera, dans le salon d’Arthénice-Catherine de Rambouillet, sur « la Dame », Lilia (c’est aussi un roman d’amour, et même épistolaire – quoiqu’à sens unique).
D’avoir péroré sur la poudre d’attraction, « la sympathie universelle qui gouverne les actions à distance », lui valut d’être envoyé par le Cardinal Mazarin (Richelieu étant mourant) vers la Terra Incognita Australe du Pacifique pour résoudre le mystère des longitudes, en espionnant le savant anglais Byrd sur l’Amaryllis, également une flûte (navire hollandais), en quête du Punto Fijo (point fixe du monde terrestre). Sur celle-ci est expérimentée la comparaison de l’heure locale à celle de Londres, convenue d’avance, en notant les réactions d’un chien emmené à bord tandis qu’on agit sur l’arme qui le blessa en Angleterre…
l’Amaryllis naufragea, et c’est sur la Daphne que Roberto découvre le père jésuite Caspar Wanderdrossel (« la grive errante » ?), rescapé de l’équipage dévoré par les cannibales, et savant qui lui explique qu’ils sont aux Îles de Salomon, sur le « méridien cent et quatre-vingts qui est exactement celui qui la Terre en deux sépare, et de l’autre part est le premier méridien » : il y a toujours un jour de différence entre un côté et l’autre. L’histoire se poursuit, entre machineries abracadabrantes et autres technasmes (artifices) de Casper, apprentissage de la natation pour Roberto, et conversations philosophico-scientifiques entre les deux. Ce n’est pas tant l’étalage plaisant de la superstition du XVIIe que les balbutiements de la connaissance basée sur la réflexion, et plus récemment sur l’expérience. Ensuite la Cloche Aquatique doit permettre d’atteindre l'Île en marchant sur le fond de la mer :
« Pendant quelques minutes Roberto assista au spectacle d’un énorme escargot, mais non, d’une vesse-de-loup, un agaric migratoire, qui évoluait à pas lents et patauds, souvent s’arrêtant et accomplissant un demi-tour sur lui-même quand le père voulait regarder à droite ou à gauche. »
Grand moment du livre :
« Et puis, tout à coup, il eut une intuition radieuse. Mais qu’allait-il bougonnant dans sa tête ? Bien sûr, le père Caspar le lui avait parfaitement dit, l’Île qu’il voyait devant lui n’était pas l’Île d’aujourd’hui, mais celle d’hier. Au-delà du méridien, il y avait encore le jour d’avant ! Pouvait-il s’attendre à voir à présent sur cette plage, qui était encore hier, une personne qui était descendue dans l’eau aujourd’hui ? Certainement pas. Le vieux s’était immergé de grand matin ce lundi, mais si sur le navire c’était lundi sur cette Île c’était encore dimanche, et donc il aurait pu voir le vieux n’y aborder que vers le matin de son demain, quand sur l’Île il serait, tout juste alors, lundi… »
Avec la Colombe Couleur Orange, Emblème et/ou Devise, le narrateur-auteur évoque le goût du temps pour les symboles et signes :
« Rappelons que c’était là un temps où l’on inventait ou réinventait des images de tout type pour y découvrir des sens cachés et révélateurs. »
Roberto souffre toujours du mal d’amour, jaloux de Ferrante (c’est aussi un roman moral, psychologique).
« Roberto savait que la jalousie se forme sans nul respect pour ce qui est, ou qui n’est pas, ou qui peut-être ne sera jamais ; que c’est un transport qui d’un mal imaginé tire une douleur réelle ; que le jaloux est comme un hypocondriaque qui devient malade par peur de l’être. Donc gare, se disait-il, à se laisser prendre par ces sornettes chagrines qui vous obligent à vous représenter l’Autre avec un Autre, et rien comme la solitude ne sollicite le doute, rien comme l’imagination errante ne change le doute en certitude. Pourtant, ajouta-t-il, ne pouvant éviter d’aimer je ne peux éviter de devenir jaloux et ne pouvant éviter la jalousie je ne peux éviter d’imaginer. »
Il disserte sur le Pays des Romans (de nouveau le roman dans le roman), puis élabore le personnage maléfique de Ferrante, perfide « sycophante double » (et c’est encore un roman de cape et d’épée). S’ensuivent de (très) longues considérations philosophico-métaphysiques.
Il y a beaucoup d’autres choses dans ce roman, comme de magnifiques descriptions (notamment de nuages, de coraux à la Arcimboldo), une immersion dans la mentalité du Moyen Âge tardif (sciences navale, cartographique, obsidionale, astronomique, imaginaire des monstres exotiques, etc.), et bien d’autres.
Le livre est bourré d’allusions dont la plupart m’a échappé, mais j’ai quand même relevé, par exemple, Tusitala, surnom donné en fait à Stevenson en Polynésie. C’est un peu un prolongement de Le Nom de la rose (confer le renvoi avec « l’histoire de personnes qui étaient mortes en se mouillant le doigt de salive pour feuilleter des ouvrages dont les pages avaient été précisément enduites de poison ») et presque un aussi grand plaisir de lecture (avec recours fréquent aux dictionnaires et encyclopédies idoines).

\Mots-clés : #aventure #historique #insularite #lieu #merlacriviere #renaissance #science #solitude #voyage

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Message par Bédoulène Lun 28 Fév - 13:07

je vais donc noter puisque tu dis presque aussi grand plaisir que le Nom de la Rose !

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Message par Tristram Lun 28 Fév - 13:20

Oui, une très bonne (re)lecture, malgré des longueurs dans la seconde partie !

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Message par Nadine Lun 28 Fév - 20:00

je l'ai d''entamé j'adorais, la lecture totale sera un plaisir evident, aussi je ne me force pas à y retourner, depuis que j'ai cessé : ça arrivera en son temps (délicieux)
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Message par ArenSor Lun 25 Avr - 15:26

Le Pendule de Foucault

Umberto Eco - Page 3 Le-pen10

Le Pendule et moi = une rencontre ratée.
Ne vous attendez donc pas à trouver ici une analyse du livre. Certes, Umberto Eco fait preuve d’une érudition étonnante (trop ?), son écriture est d’une intelligence étincelante (trop ?), mais cette  débauche d’ésotérisme m’a très rapidement lassé, me donnant une désagréable impression d’indigestion. Au bout d’une centaine de pages, je n’en pouvais plus des Templiers, des Rose-Croix et autres sociétés secrètes et j’ai failli abandonner la lecture. Je suis tout de même allé jusqu’au bout, mais avec un profond ennui.
Surtout, j’ai eu l’impression d’un pur jeu intellectuel, très brillant (vous me direz, c’est déjà pas si mal), mais finalement assez creux et qui ne méritait peut-être pas plus de 600 pages.
Pourtant, j’avais bien aimé « Le Cimetière de Prague » qui présente beaucoup d’analogies avec « Le Pendule ». Alors, peut-être une impression de redite ? Peut-être pas le bon moment pour lire ce type de livre. Allez savoir !
Il y a tout de même des choses intéressantes, et parfois amusantes, sur l’édition par exemple :
« Dans une maison d’édition, tout le monde perd les manuscrits. Je crois que c’est l’activité principale. Mais il faut bien avoir un bouc émissaire, vous ne pensez pas ? Je lui reproche seulement de ne pas perdre ceux que je voudrais qu’elle perde. »
« Le lancement devait être satrapique. Communiqué de presse de dix pages, avec biographie et essai critique. Aucune pudeur, aussi bien dans les rédactions des journaux on le jetterait au panier. Impression effective : mille exemplaires en feuillets volants dont seulement trois cent cinquante reliés. Deux cents à l’auteur, une cinquantaine à des librairies secondaires et réunies en consortium, cinquante aux revues de province, une trentaine aux journaux pour conjurer le mauvais sort, au cas où il leur resterait une ligne dans la rubrique des livres reçus. Leur exemplaire, ils l’enverraient en cadeau aux hôpitaux ou aux prisons – et on comprend pourquoi les premiers ne guérissent pas et les seconds ne rachètent pas. »
J’ai beaucoup aimé ces paragraphes également sur les mégalithes ou la géographie mystique de Paris (Tour Eiffel, Beaubourg, conservatoire des Arts et Métiers...) :
« Cependant, les Celtes croyaient qu’il suffisait de découvrir le plan global des courants. Voilà pourquoi ils érigeaient des mégalithes : les menhirs étaient des appareils radiesthésiques, comme des fiches, des prises électriques enfoncées dans les points où les courants se ramifiaient en différentes directions. Les leys indiquaient le parcours d’un courant déjà repéré. Les dolmens étaient des chambres de condensation de l’énergie où les druides, par des artifices géomantiques, cherchaient à extrapoler le dessin global ; les cromlechs et Stonehenge étaient des observatoires micro-macrocosmiques d’où on s’escrimait à deviner, à travers l’ordre des constellations, l’ordre des courants – car, ainsi que le veut la Tabula Smaragdina, ce qui se trouve dessus est isomorphe à ce qui se trouve dessous. »
« La Tour Eiffel, nous avait-il dit le matin suivant. Comment n’y avoir pas encore pensé ? Le mégalithe de métal, le menhir des derniers Celtes, la flèche creuse plus haute que toutes les flèches gothiques. Pourquoi Paris avait-il eu besoin de ce monument inutile ? C’est la sonde céleste, l’antenne qui recueille des informations de toutes les fiches hermétiques enfoncées dans la croûte du globe, des statues de l’Ile de Pâques, du Machupicchu, de la Liberté de Bedloe’s Island, prévue par l’initié La Fayette, de l’obélisque de Louxor, de la tour la plus haute de Tomar, du Colosse de Rhodes qui continue à émettre des profondeurs du port où plus personne ne le trouve, des visages du Mount Rushmore (que de choses avait comprises l’initié Hitchcock), de l’antenne de l’Empire State… »
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Message par Tristram Lun 25 Avr - 16:08

Oui, mais aussi belle démonstration de complotisme (d'où le côté embrouillé), avec ce pseudo-scientifique et cette vague notion de sacré qu'on voit resurgir un peu partout, malgré
« …] cette lumière intellectuelle qui nous fait toujours distinguer le semblable de l’identique, la métaphore des choses en soi [… »
A propos de l'édition :
« Adolescents, on a tous écrit des poésies, ensuite les vrais poètes les ont détruites et les mauvais poètes les ont publiées. »
Au sujet de la surinterprétation des signes, de cabbale et ordinateur, de secret "vide" (qui n'existe pas) et pouvoir, et aussi pour l'humour :


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Message par Bédoulène Lun 25 Avr - 17:25

je n'ai pas lu le pendule Aren, mais le cimetière de Pragues et l'ésotérisme m'avait ennuyée, mais j'avais tout de même apprécié le livre, là il me semble que trop d'ésotérisme me lasserait aussi.

C'était l'un des livres préféré de Shanidar !

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Message par Nadine Lun 25 Avr - 19:54

Super, l'entretien . Merci pour ces retours les chosiens ! J'ai prêté mon "L'île du jour d'avant" à un dévoreur du coin. J espere qu'il y va trouver son gras.
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Message par Tristram Lun 24 Oct - 13:57

Construire l’ennemi et autres textes occasionnels

Umberto Eco - Page 3 Constr10

Dans Construire l’ennemi, Eco documente la stigmatisation de l’étranger, du laid, du juif, de l’hérétique, de la femme (notamment sorcière), du lépreux à travers les temps, en produisant nombre d’extraits édifiants (sans omettre les auteurs religieux).
« Il semble qu’il soit impossible de se passer de l’ennemi. La figure de l’ennemi ne peut être abolie par les procès de civilisation. Le besoin est inné même chez l’homme doux et ami de la paix. Simplement, dans ces cas, on déplace l’image de l’ennemi, d’un objet humain à une force naturelle ou sociale qui, peu ou prou, nous menace et doit être combattue, que ce soit l’exploitation du capitalisme, la faim dans le monde ou la pollution environnementale. Mais, même si ce sont là des cas « vertueux », Brecht nous rappelle que la haine de l’injustice déforme elle aussi le visage. »

« Essayer de comprendre l’autre, signifie détruire son cliché, sans nier ou effacer son altérité. »
Mention particulière à La paix indésirable ? Rapport sur l’utilité des guerres, effarante justification états-unienne (et orwellienne) de la nécessité de l’ennemi, notamment pour des raisons économiques (anonyme, préfacé par J. K. Galbraith).

Absolu et relatif nous entraîne dans un débat philosophique qui revient rapidement au problème de notre conception de la vérité (atteignable ou pas).

La flamme est belle est une réflexion sur le feu, qui n’oublie pas Bachelard, entr’autres.
« Les amis pleins de sollicitude brûlent, pour des raisons de moralité et de santé mentale, la bibliothèque romanesque de Don Quichotte. On brûle la bibliothèque d’Auto da fé d’Elias Canetti, en un bûcher qui rappelle le sacrifice d’Empédocle (« quand les flammes l’atteignent enfin, il rit à pleine voix comme il n’avait jamais ri de sa vie »). »
Délices fermentées est consacré à Piero Camporesi, auteur de L’Officine des sens et « gourmet de listes ».

« Hugo, hélas ! » La poétique de l’excès :
« Le goût de l’excès le conduit à décrire en procédant par énumérations interminables [… »

« La beauté n’a qu’un type, la laideur en a mille. »
Cela m’a ramentu cette phrase (souvenir scolaire – on a beau dire du mal de l’école…) :
« Si le poète doit choisir dans les choses (et il le doit), ce n’est pas le beau, mais le caractéristique. »
Astronomies imaginaires (mais pas astrologie, croyance ou tromperie).

Je suis Edmond Dantès ! sur le roman-feuilleton, et « l’agnition ou reconnaissance » (d’un lien de parenté entre personnages) ; le texte commence ainsi :
« Certains infortunés se sont initiés à la lecture en lisant, par exemple, du Robbe-Grillet. Illisible si l’on n’a pas compris les structures ancestrales de la narration, qu’il détourne. Pour savourer les inventions et déformations lexicales de Gadda, il faut connaître les règles de la langue italienne et s’être familiarisé au bon toscan avec Pinocchio. »
Il ne manquait plus qu’Ulysse. Époustouflant patchwork de critiques du livre de Joyce, où la bêtise le dispute à l’antisémitisme.

Pourquoi l’île n’est jamais trouvée. Incipit :
« Les pays de l’Utopie se trouvent (à de rares exceptions près, comme le royaume du Prêtre Jean) sur une île. »
Texte passionnant sur l’histoire de la (non-)découverte d’îles plus ou moins fabuleuses.
« C’est parce que, jusqu’au XVIIIe siècle, date à laquelle on a pu déterminer les longitudes, on pouvait découvrir une île par hasard et, à l’instar d’Ulysse, on pouvait même s’en échapper mais il était impossible de la retrouver. »
C’est l’argument de L’Île du jour d’avant, mais on découvre aussi l’« Ile Perdue, Insula Perdita », île des Bienheureux de saint Brendan, et même un décryptage de La Ballade de la mer salée d’Hugo Pratt.

Réflexions sur WikiLeaks
« Sur le plan des contenus, WikiLeaks s’est révélé être un scandale apparent, alors que sur le plan de la forme, il a été et sera quelque chose de plus, il a inauguré une nouvelle époque historique.
Un scandale est apparent quand il rend publique une chose que tout le monde savait en privé, et dont on parlait à mi-voix par pure hypocrisie (cf. les ragots sur un adultère). »

« Et cela ne fait que confirmer une autre chose que l’on sait pertinemment : chaque dossier élaboré pour un service secret (de quelque nation que ce soit) est constitué exclusivement de matériel qui est déjà dans le domaine public. Par exemple : dans une librairie consacrée à l’ésotérisme, on s’aperçoit que chaque nouvel ouvrage redit (sur le Graal, le mystère de Rennes-le-Château, les Templiers ou les Rose-Croix) exactement ce qui figurait dans les livres précédents. Et ce n’est pas que l’auteur de textes occultistes s’interdise de faire des recherches inédites (ou ignore comment chercher des informations sur l’inexistant), mais parce que les occultistes ne croient qu’à ce qu’ils savent déjà, et qui reconfirme ce qu’ils avaient déjà appris. C’est d’ailleurs là le mécanisme du succès de Dan Brown.
Idem pour les dossiers secrets. L’informateur est paresseux tout comme est paresseux, ou d’esprit limité, le chef des services secrets, qui ne croit que ce qu’il reconnaît.
Par conséquent, puisque, dans tous les pays, les services secrets ne servent pas à prévoir des cas comme l’attaque des Twins Towers et qu’ils n’archivent que ce qui est déjà connu de tous, il vaudrait mieux les éliminer. Mais, par les temps qui courent, supprimer encore des emplois serait vraiment insensé.
Si les États continuent à confier leurs communications et leurs archives confidentielles à Internet ou d’autres formes de mémoire électronique, aucun gouvernement au monde ne pourra plus nourrir des zones de secret, et pas seulement les États-Unis, mais même pas la République de Saint-Marin ou la principauté de Monaco (peut-être que seule Andorre sera épargnée). »

« Et même si la grande masse des citoyens n’est pas en mesure d’examiner et d’évaluer la quantité de matériel que le hacker capture et diffuse, la presse joue désormais un nouveau rôle (elle a déjà commencé à l’interpréter) : au lieu de relayer les nouvelles vraiment importantes – jadis, c’étaient les gouvernements qui décidaient des nouvelles vraiment importantes, en déclarant une guerre, en dévaluant une monnaie, en signant une alliance –, aujourd’hui c’est elle qui décide en toute autonomie des nouvelles qui doivent devenir importantes et de celles qui peuvent être passées sous silence, allant jusqu’à pactiser (cela est arrivé) avec le pouvoir politique pour savoir quels « secrets » dévoilés il convenait de révéler et ceux qu’il fallait taire.
Puisque tous les rapports secrets qui alimentent haines et amitiés d’un gouvernement proviennent d’articles publiés ou de confidences de journalistes à un attaché d’ambassade, la presse prend une autre fonction : jadis, elle épiait le monde des ambassades étrangères pour en connaître les trames occultes, désormais ce sont les ambassades qui épient la presse pour y apprendre des manifestations connues de tous. »
Tout le bref texte devrait être cité !
Et c’est toujours aussi délectable de se régaler de l’esprit d’Umberto Eco…

\Mots-clés : #complotisme #contemporain #discrimination #ecriture #espionnage #essai #guerre #humour #medias #philosophique #politique #social #universdulivre #xxesiecle

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« Nous causâmes aussi de l’univers, de sa création et de sa future destruction ; de la grande idée du siècle, c’est-à-dire du progrès et de la perfectibilité, et, en général, de toutes les formes de l’infatuation humaine. »
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Message par Bédoulène Lun 24 Oct - 20:40

Je note, merci Tristram !

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“Lire et aimer le roman d'un salaud n'est pas lui donner une quelconque absolution, partager ses convictions ou devenir son complice, c'est reconnaître son talent, pas sa moralité ou son idéal.”
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Message par Tristram Lun 18 Sep - 12:26

Comment écrire sa thèse

Umberto Eco - Page 3 Commen11

« …] une thèse sert avant tout à apprendre à organiser ses idées, indépendamment de son sujet. »
Eco expose avec une extrême clarté la méthode rigoureuse, et d’une logique imparable, pour effectuer une recherche et la présenter de façon cohérente.
À noter que cet essai est paru pour la première fois en 1977, ce qui explique le recours aux fiches cartonnées, souvenir d’un usage aboli par la démocratisation de l’informatique.
« Tout dépend bien sûr aussi de la structure psychologique du chercheur. Il existe des personnes monochroniques et des personnes polychroniques. Les monochroniques ne travaillent bien que s'ils commencent et finissent une chose à la fois. Ils ne peuvent lire en écoutant de la musique ni interrompre un roman pour en commencer un autre, sous peine de perdre le fil – c'est à peine s'ils peuvent répondre à des questions pendant qu'ils se rasent ou se maquillent. Les polychroniques sont tout l'opposé. Ils ne travaillent bien que s'ils mènent de front plusieurs projets à la fois, et s'ils se consacrent à une seule chose, ils succombent à l'ennui. Les monochroniques sont plus méthodiques, mais ils ont souvent peu d'imagination. Les polychroniques sont plus créatifs, mais ils sont souvent brouillons et instables. Si vous parcourez les biographies des grands auteurs, vous verrez qu'il y eut des polychroniques et des monochroniques. »

« Une des premières choses à faire quand on commence à travailler à sa thèse est d'en écrire le titre et d'en rédiger l'introduction et la table des matières – c'est-à-dire de faire exactement ce que n'importe quel auteur fait en dernier. […]
Il est clair à présent que l'introduction et la table des matières seront constamment réécrites au fur et à mesure que progressera votre travail. C'est ainsi. La table des matières et l'introduction finales (celles qu'on lira dans votre tapuscrit) seront différentes de celles que vous aurez écrites au début. C'est normal. Si ce n'était pas le cas, cela voudrait dire que tout le travail de recherche que vous aurez effectué ne vous aura pas apporté une seule idée nouvelle. Sans doute avez-vous beaucoup de suite dans les idées, mais il était inutile de faire une thèse. »
Même si l’on n’a pas de velléités universitaires, il me semble que cette pédagogie de la démarche rationnelle peut être utile d’une façon plus générale, ne serait-ce que dans la manière de citer ses sources sans ambigüité.

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Message par Albert Lun 18 Sep - 15:56

La rigueur est malheureusement une valeur passée de mode.
Je suis un peu sceptique cependant sur la dichotomie entre monochroniques et polychroniques. Si j'essaie d'analyser mon comportement, il est tantôt l'un tantôt l'autre. Plutôt mono, s'il y a une échéance, plutôt poly si rien ne presse. Et vous les forumeurs, qu'en pensez-vous??

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Message par Tristram Lun 18 Sep - 16:03

Ça dépend en effet des circonstances, et des habitudes personnelles. Disons qu'il existe les deux tendances, qui peuvent coexister à différents degrés selon chacun ? Dans le même registre, il y a ceux qui ne peuvent lire qu'un livre à la fois, et d'autres qui mènent plusieurs lectures de front. Là, ça dépend aussi des livres, plus ou moins longs ou ardus notamment...

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Message par Bédoulène Mar 19 Sep - 14:03

je suis monochronique en général, et ce n'est pas bon pour la mémoire.

est-ce que cette méthode aiderait pour faire les commentaires ?

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